Noctuelle sombre des dunes (Copablepharon longipenne) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 8

Biologie

De nombreux aspects de la biologie du C. longipenne demeurent méconnus. Ce papillon nocturne présente une période de vol estivale brève et est difficile à observer dans la nature. Nos connaissances actuelles de sa biologie sont fondées sur des observations limitées réalisées sur le terrain en août 2004 et en juillet 2005 et des données publiées dans Lafontaine (2004), Fauske (1992), Seamans (1925) et Strickland (1920).


Cycle vital et reproduction

Le C. longipenneest une espèce univoltine et ne compte qu’une période de vol par année. Au Canada, cette période s’étale sur une dizaine de semaines, de la mi-juillet à la fin août (figure 8), et atteint son point culminant en juillet. La période de vol semble similaire aux États-Unis, mais elle peut se prolonger jusqu’en septembre. Cette disparité est peut-être due à des écarts climatiques liés à un gradient nord-sud ou attribuable à des données échantillonnage incomplètes. La reproduction coïncide avec la période de vol, et les adultes meurent peu de temps après s’être reproduits.


Figure 8 : Période de vol estimée du C. longipenne, telle qu’établie d’après les données d’échantillonnage disponibles

Figure 8. Période de vol estimée du C. longipenne, telle qu’établie d’après les données d’échantillonnage disponibles.

Les barres claires sont fondées sur les mentions recensées à l’échelle de l’Amérique du Nord, et les barres foncées, sur les mentions canadiennes.

Des adultes ont été observés en soirée en train de se nourrir de nectar sur des fleurs de plantes de dunes, en particulier de psoralée lancéolée. Des accouplements ont été observés à deux reprises en 2005, un sur la portion inférieure d’une tige de chalef argenté, l’autre directement sur le sable, à proximité de la végétation (figure 9). Des observations de terrain indiquent que les femelles déposent leurs œufs par groupes de 15 à 35, à environ 10 mm sous la surface du sable. D’après des observations d’œufs récoltés en août 2004, l’éclosion survient environ 3 semaines après la ponte.

Seamans (1925) a observé des chenilles s’alimentant sur des parties souterraines de rosiers. La période d’alimentation larvaire débute vraisemblablement immédiatement après l’éclosion des œufs en août et se poursuit jusqu’à l’arrivée du temps frais en septembre et octobre. Entre l’automne et le début du printemps, les chenilles subissent probablement une diapause souterraine, mais on ignore à quel endroit et à quelle profondeur elles s’enfouissent. Si l’on extrapole au C. longipenne ce qui a été observé chez le C. fuscum Troubr. et Crabo dans une région côtière de la Colombie-Britannique (COSEPAC, 2004), les chenilles se nourrissent peut-être également au printemps ou au début de l’été avant de se nymphoser. On sait très peu de choses sur le stade nymphal, si ce n’est que la chrysalide est vraisemblablement formée entre le début de juin et la fin de juillet et que la vie nymphale dure de 17 à 19 jours (Seamans, 1925). La durée de vie adulte est inconnue.


Figure 9 : Reproduction et prédation : a) accouplement observé en juillet 2005 (Great Sand Hills, Saskatchewan); b) des traces de prédation par les oiseaux ont fréquemment été observées sur le bord de dunes actives

Figure 9. Reproduction et prédation : a) accouplement observé en juillet 2005 (Great Sand Hills, Saskatchewan); b) des traces de prédation par les oiseaux ont fréquemment été observées sur le bord de dunes actives (la flèche montre des ailes rejetées par un oiseau).

La flèche montre des ailes rejetées par un oiseau.

Des observations effectuées dans les Seward Sand Hills en août 2004 laissent sous-entendre que les femelles déposent leurs œufs sur la face sous le vent des dunes actives. Le dépôt des œufs dans des sites formés par accrétion pourrait contribuer à réduire l’exposition et la prédation des œufs et leur dessiccation par le sable en mouvement.

Les deux sexes sont habituellement représentés en proportions égales dans les collections (J. Troubridge, comm. pers.).


Prédation et parasitisme

Seamans (1925) a élevé des chenilles de C. longipenne en captivité et n’a relevé aucun cas de parasitisme. À son avis, le mode d’alimentation souterrain des chenilles les protège des parasitoïdes. Des traces de prédation par les oiseaux ont fréquemment été observées dans les sites d’échantillonnage en juillet 2005. À l’aube, des ailes de noctuelles sombres des dunes ont été trouvées à côté de traces d’oiseaux (figure 9). Certaines espèces de petits oiseaux, comme les bruants, semblaient rechercher activement les adultes cachés parmi les arbustes et herbacées à feuilles larges en bordure des dunes actives. Des engoulevents communs (Chordeiles minor Forster) se nourrissant d’insectes volants ont également été aperçus au-dessus de dunes en Saskatchewan. On ignore si de petits mammifères (p. ex. les chauves-souris ou les rongeurs) ou d’autres invertébrés (p. ex. les coléoptères) se nourrissent d’œufs, de chenilles ou d’adultes.


Physiologie

La période de vol du C. longipenne est synchronisée avec le réchauffement des températures au début de l’été. Le développement larvaire se déroule en juillet et en août, les deux mois les plus chauds dans les Prairies canadiennes. Les chenilles hibernent vraisemblablement dans le sable, mais on ignore dans quelles conditions s’effectue la diapause (p. ex. la profondeur d’enfouissement dans le sable) ou l’hibernation.

L’incidence du climat sur la répartition du C. longipenne est inconnue. Le C. longipenne habite la région la plus chaude et la plus sèche des Prairies canadiennes. Au plan climatique, cette région (données pour Swift Current [Saskatchewan]) présente les caractéristiques suivantes : température mensuelle hivernale moyenne (de décembre à février) : –10,8 °C; température mensuelle estivale moyenne (de juin à sept.) : 16,9 °C; précipitations mensuelle hivernales moyennes : 17,3 mm (la majorité sous forme de neige); précipitations estivales mensuelle moyennes : 55,5 mm. On ignore de quelle façon les fluctuations des températures saisonnières influent sur les périodes de vol et d’accouplement des adultes et la survie des chenilles.


Dispersion et migration

La capacité de dispersion du C. longipenne n’a pas été mesurée. Des observations effectuées sur le terrain laissent sous-entendre que cette noctuelle possède un vol puissant. Des adultes ont facilement évité un filet dirigé dans leur direction en présence de forts vents. Comme les habitats de dunes exposées sont souvent répartis en îlots à l’échelle du paysage (séparés par des distances de 0,1 à 2,5 km), les adultes se dispersent probablement fréquemment à une telle échelle. Toutefois, à l’échelle régionale, leur dispersion entre régions de dunes séparées par des distances supérieures à 10 km est considérée comme peu probable ou très peu fréquente. Rien ne permet de croire que le C. longipenne est migrateur.


Relations interspécifiques

On ne connaît aucune relation interspécifique susceptible de réduire la survie du C. longipenne. D’après les observations disponibles, les femelles déposent leurs œufs dans le sable, dans des zones exposées, et non sur les feuilles ou les fleurs des plantes nourricières. Selon Seamans (1925), cette espèce se nourrirait exclusivement de rosiers à l’état larvaire. Pourtant, aucun rosier n’a été trouvé à plusieurs des endroits où le C. longipenne a été capturé en 2004-2005. Il y a donc lieu de croire que les chenilles peuvent se nourrir sur des graminées (l’élyme du Canada, des agropyres, etc.), des espèces arbustives (des rosiers, le chalef argenté, etc.) ou des herbacées à feuilles larges (p. ex. la psoralée lancéolée ou la patience veineuse).


Adaptabilité

On ne dispose d’aucune donnée sur l’adaptabilité du C. longipenne autre que les observations se rapportant au cycle vital décrites précédemment. Le C. longipenne tolère bien les perturbations induites par le mouvement fréquent du sable dans les dunes actives. Toutefois, en raison de ses besoins spécifiques en matière d’habitat, il est probablement incapable de s’adapter au changement de son habitat.

Seamans (1925) est parvenu à élever jusqu’au stade adulte des jeunes chenilles de C. longipenne.

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