Loup atlantique (Anarhichas lupus) évaluation et rapport de situation du COSEPAC 2012: chapitre 8

Habitat

Besoins en matière d’habitat

Les préférences du loup atlantique en matière d’habitat pour ce qui est de la température, de la profondeur et du type de fond ont été décrites par Kulka et al. (2004) et Simpson et al. (2011). L’espèce occupe différents milieux selon le stade de développement : les œufs sont déposés sur le fond, les larves sont pélagiques, et les jeunes et les adultes vivent près du fond. Dans les eaux littorales, les œufs sont déposés dans des crevasses sur des fonds rocheux (Keats et al.,1985). Les larves sont pélagiques jusqu’à ce qu’elles atteignent une longueur de 30 à 35 mm (Wiseman, 1997, in Kulka et al., 2007a). Les jeunes loups tachetés utilisent des abris (Lachance et al., 2010), ce qui pourrait aussi être le cas des jeunes loups atlantiques.

Sur le plateau continental, les jeunes et les adultes vivent dans des zones à fond rocheux ou sableux. Selon les observations de plongeurs, l’espèce n’est pas présente sur des substrats mous, par exemple argileux ou vaseux, dans les eaux côtières, et elle semble avoir besoin de blocs rocheux ou de cavernes pour la fraye (Kulka et al., 2004).

On trouve des loups atlantiques depuis les eaux littorales jusqu’à des profondeurs de 918 m (Kulka et al., 2004, 2007a). Dans les eaux de Terre-Neuve, les effectifs sont le plus élevés à la profondeur de 250 m durant toute l’année (Kulka et al., 2004). Le loup atlantique est la seule des trois espèces de loups qui est fréquemment présente à des profondeurs de moins de 100 m. Sur le plateau néo-écossais et les bancs de Terre-Neuve et dans le golfe du Saint-Laurent, il occupe habituellement des eaux d’une profondeur de moins de 150 m. Sur le plateau néo-écossais, il est souvent observé à des profondeurs de 100 à 350 m (McRuer et al., 2000).

Chez le loup atlantique, la sélection de l’habitat serait principalement fonction de la température (Kulka et al., 2004). L’espèce est très souvent observée dans des abris se trouvant sous la thermocline et la profondeur jusqu’à laquelle les courants de marée et les courants côtiers exercent leur influence (Dutil et al., 2010). D’autres types de fonds peuvent aussi fournir des refuges, comme les fonds à végétation dense ou les fonds mous accidentés.

Selon les résultats des relevés scientifiques réalisés à Terre-Neuve, les plus fortes densités de loups atlantiques se trouvent dans des eaux dont les températures se situent entre 1,5 et 4 °C (Kulka et al., 2004). Au sud, sur le plateau néo-écossais, c’est dans une fourchette de températures similaire que l’espèce préfère vivre, mais elle est présente à des températures se situant entre 1 et 9 °C (Simon et al., 2011). Les plongeurs n’observent pas de loups atlantiques à des températures supérieures à 10 °C, et l’espèce peut tolérer des températures inférieures à 0 °C (Kulka et al., 2004). Sur le plateau néo-écossais, et probablement dans l’ensemble de son aire de répartition, ce poisson est présent dans des eaux dont la salinité se situe entre 32 et 34 ‰ (Albikovskaya, 1982). Sur la base d’observations faites en plongée, Kulka et al. (2004) ont signalé l’absence de loups atlantiques dans des eaux de faible salinité.

Tendances en matière d’habitat

À la fin des années 1980 et au début des années 1990, les eaux sont demeurées exceptionnellement froides (Colbourne et al., 1997). La figure 10 montre la variation des indices de l’oscillation arctique (OA) et de l’oscillation nord-atlantique (ONA) entre 1950 et 2010 (Yashayaev et Greenan, 2011). Un indice positif est associé à la présence de conditions inhabituellement froides dans le nord de la mer du Labrador. L’indice a atteint ses plus fortes valeurs depuis 1950 entre la fin des années 1980 et le milieu des années 1990. La dernière partie de cet épisode de basses températures a coïncidé avec le rétrécissement rapide de la répartition des espèces de loups (Kulka et al., 2004), mais les zones d’occupation de ces dernières avaient commencé à diminuer bien avant (figure 7). Durant cette période, sous toute réserve, il se pourrait que les loups atlantiques aient déserté les eaux moins profondes pour se réfugier dans les eaux plus profondes et plus chaudes.


Figure 10. Variations des indices hivernaux de l’oscillation arctique (OA) et de l’oscillation nord-atlantique (ONA), avec 1950-2000 comme période de référence. Le calcul des indices est effectué à partir des données de janvier, février et mars. Source : Yashayaev et Greenan (2011).

Graphique montrant les variations des indices de l’oscillation arctique et de l’oscillation nord-atlantique de 1950 à 2010 (voir description longue ci-dessous).
Description pour la figure 10

Graphique montrant les variations des indices de l’oscillation arctique et de l’oscillation nord-atlantique de 1950 à 2010. Ce graphique révèle qu’à la fin des années 1980 et dans les années 1990, les eaux sont demeurées particulièrement froides, les indices présentant des valeurs plus élevées dans cette période. Un indice positif est associé à la présence de conditions inhabituellement froides.

Les tendances futures à long terme de la température des eaux demeurent incertaines. Les changements climatiques mondiaux influeront probablement sur l’habitat et la répartition du loup atlantique. L’accroissement des températures dans le nord-ouest de l’Atlantique pourrait entraîner un déplacement vers le nord de plusieurs espèces de poissons marins, dont le loup atlantique (Gucinski et al., 1990), comme cela a été observé pour de nombreuses espèces dans le nord-est de l’Atlantique (Perry et al., 2005).

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