Rapport annuel sur la Loi sur les espèces en péril 2012 : chapitre 5

5 Mise en œuvre des programmes de rétablissement

5.1 Protection de l'habitat essentiel

La LEP exige que tout habitat essentiel désigné dans un programme de rétablissement ou dans un plan d'action soit protégé de façon à assurer sa préservation. Ceci comprend tout habitat essentiel désigné dans la zone exclusive économique et dans le plateau continental du Canada.

En 2012, Environnement Canada a élaboré une approche permettant de faciliter l'évaluation de la protection de l'habitat essentiel sur le territoire domanial et a continué d'inviter plusieurs ministères fédéraux à discuter de questions liées à la protection de l'habitat essentiel sur le territoire domanial. De plus, une approche de gestion des risques a été élaborée afin d'améliorer le processus d'évaluation de la protection efficace de l'habitat essentiel établi en 2010 avec la collaboration des gouvernements des provinces et territoires. Les efforts se poursuivent pour officialiser d'autres aspects de la protection de l'habitat essentiel sur les terres administrées par Environnement Canada, par d'autres ministères fédéraux et par les gouvernements provinciaux et territoriaux.

En 2012, l'Agence Parcs Canada a protégé l'habitat essentiel de quatre espèces dans quatre de ses aires patrimoniales protégées : le micocoulier rabougri (parc national du Canada de la Pointe-Pelée), l'isoète de Bolander (parc national du Canada des Lacs-Waterton), la Chevêche des terriers (parc national du Canada des Prairies) et le carex des sables (parc national du Canada Kluane). Des efforts sont en cours afin de mettre au point les mesures de protection concernant l'habitat essentiel d'autres espèces vivant sur les terres administrées par l'Agence Parcs Canada.

Les provinces et les territoires ont la responsabilité première de la gestion des terres autres que le territoire domanial, ainsi que des ressources naturelles et des espèces sauvages s'y trouvant. Cette responsabilité comprend la protection de l'habitat essentiel des espèces en péril sur ces terres (sauf les espèces aquatiques) et la mise en œuvre, par l'entremise de leurs lois et programmes, de mesures de protection. Les interdictions relatives à l'habitat essentiel définies dans le paragraphe 615 de la LEP ne s'appliquent au territoire non domanial que lorsque le gouverneur en conseil prend un décret, communément appelé « décret de filet de sécurité ». Le ministre peut recommander un décret de filet de sécurité au gouverneur en conseil seulement si aucune autre loi fédérale n'est apte à offrir la protection nécessaire et seulement si le ministre est d'avis que les lois de la province ou du territoire ne protègent pas efficacement l'habitat essentiel d'une espèce.

5.2 Activités de rétablissement

5.2.1 Activités de rétablissement des ministères compétents

En 2012, les biologistes d'Environnement Canada à l'échelle du pays ont continué à mener et soutenir des activités telles que des projets de recherche, d'éducation et de sensibilisation, d'amélioration et de restauration d'habitats, de suivi ou d'évaluation. Ces activités ont favorisé le rétablissement de nombreuses espèces en péril provenant d'une variété importante de taxons.

Par exemple, la Mouette blanche, en voie de disparition, est une espèce circumpolaire dont la population reproductrice est petite dans le Nord du Canada. Des données de localisation obtenus par télémesure satellitaire ont fourni des renseignements sur des aires de nidification inconnues jusqu'à présent, sur des routes migratoires encore inconnues ou non confirmées et sur les périodes de migration saisonnière. Les données ont également révélé qu'une proportion importante de la population mondiale de Mouettes blanches pourrait hiverner dans les eaux canadiennes de l'océan Atlantique Nord, à proximité d'une route de navigation proposée pouvant être empruntée toute l'année dans une zone de trafic maritime élevé, où des activités seront vraisemblablement menées toute l'année dans un avenir prochain.


Mouette blanche dans une colonie de nidification au Refuge d'oiseaux migrateurs de l'île Seymour. © Mark Mallory

Mouette blanche dans une colonie de nidification au Refuge d'oiseaux migrateurs de l'île Seymour.

En 2012, Pêches et Océans Canada a mené ou soutenu plusieurs activités visant la protection et le rétablissement d'espèces aquatiques en péril. Ces activités, de portée et d'ampleur variables, comprennent des projets de recherche scientifique visant à améliorer l'habitat essentiel, l'élaboration d'outils de vérification de la conformité et de l'application de la loi ainsi que des activités d'éducation et de sensibilisation.

Par exemple, il a été établi que les prises accidentelles lors de la pêche commerciale constituent la principale cause de mortalité d'origine anthropique du loup de mer. Pêches et Océans Canada a augmenté le nombre de patrouilles et déployé des agents des pêches chargés de vérifier si les prises accidentelles de loup de mer étaient correctement traitées et rapidement remises à l'eau. Des vérifications périodiques à la recherche de prises illégales de loup de mer ont également été menées dans des usines et des postes de débarquement du poisson.

Plusieurs études ont également été menées par les scientifiques de Pêches et Océans Canada dans le but de parfaire les connaissances des différentes étapes du cycle de vie de nombreuses espèces aquatiques en péril. Par exemple, un relevé a été effectué dans le but de combler des lacunes en matière de renseignements sur la répartition du chat-fou du Nord dans le lac Sainte-Claire. Une autre étude a porté sur la dérive larvaire ainsi que sur les habitudes saisonnières et les habitats privilégiés par la population d'esturgeon blanc de la rivière Nechako.

En 2012, l'Agence Parcs Canada a continué d'appuyer la mise en œuvre d'activités de rétablissement dans les aires patrimoniales protégées et autour de celles-ci, y compris des activités de recherche, des activités de restauration ainsi que des activités de sensibilisation et d'éducation du public. Ces activités sont menées selon une approche intégrée, le public et les intervenants participant à des mesures de rétablissement directes.

Plusieurs projets de l'Agence Parcs Canada ont été menés en partenariat avec des organisations non gouvernementales, des établissements d'enseignement, des particuliers ou des collectivités autochtones. En 2012, dans les parcs nationaux de tous les coins du Canada, quelque 560 bénévoles ont consacré plus de 10 000 heures de leur temps à des projets liés aux espèces en péril, notamment le programme volontaire de restauration des écosystèmes du chêne de Garry, programme actif toute l'année et dont les résultats sur le plan de la conservation sont tangibles puisqu'il contribue à l'élimination des espèces envahissantes, à la restauration des habitats et à la réintroduction d'espèces. Ces projets volontaires contribuent également à mettre les Canadiens en contact avec les aires patrimoniales protégées de l'Agence Parcs Canada.

Au-delà de nos frontières : partenariat visant l'identification des aires d'hivernage du Pluvier siffleur

Avant l'hiver 2011, les déplacements du Pluvier siffleur hors de la période de reproduction étaient en grande partie inconnus. En effet, seulement 40 à 60 % des individus reproducteurs de cette espèce en voie de disparition avaient jusqu'alors été repérés en hiver. Grâce à la collaboration internationale entre les biologistes du Service canadien de la faune d'Environnement Canada et les Bahamas, le second site d'hivernage en importance pour le Pluvier siffleur a été découvert.

Les îles des Bahamas ont fait l'objet de relevés lors du recensement international du Pluvier siffleur de 2011. Ce recensement a lieu tous les cinq ans depuis 1991. Plus de mille oiseaux ont été comptabilisés, ce qui représente une augmentation considérable par rapport aux décomptes précédents et démontre les efforts déployés dans les activités de recensement. (1991 : 19 oiseaux; 1996 : 25 oiseaux; 2001 : 35 oiseaux; 2006 : 417 oiseaux). La découverte de concentrations de Pluviers siffleurs aux Bahamas est emballante et la découverte de cette aire d'hivernage contribue à combler des lacunes importantes dans la connaissance de cette espèce. La découverte d'aires d'hivernage cruciales permet de reconnaître les menaces potentielles auxquelles l'espèce pourrait faire face et facilitera les initiatives en matière de conservation qui, jusqu'à présent, avaient principalement ciblé les menaces pour l'espèce sur les lieux de reproduction.

En 2012, Environnement Canada a poursuivi sa collaboration avec ses collègues du Bahamas National Trust, de la National Audubon Society, d'Études d'Oiseaux Canada, du Fish and Wildlife Service des États-Unis ainsi que du Geological Survey des États-Unis dans le but de soutenir les initiatives en matière de conservation du Pluvier siffleur aux Bahamas.

Réintroduction de l'abronie rose

L'abronie rose est une plante rare partout sur la planète et l'une des espèces les plus rares au Canada. Historiquement, elle était connue dans trois endroits au Canada, tous sur l'orageuse côte ouest de l'Île de Vancouver. Pendant de nombreuses années, l'abronie rose était considérée comme disparue du pays puisqu'elle n'avait plus été observée depuis les années 1940. Cependant, en 2001, elle a été répertoriée sur le sentier de la côte ouest de la réserve de parc national du Canada Pacific Rim de (RPNPR). Cette découverte emballante a permis aux écologistes de l'Agence Parcs Canada, en partenariat avec des naturalistes locaux, de procéder à la collecte de semences et de commencer l'élevage de plantules en serre afin de les réintroduire dans la nature. Depuis cinq ans, des activités de remise en état de l'habitat ont été entreprises afin de tenter le rétablissement de l'abronie rose, presque disparue au Canada.

Bien qu'il soit encore trop tôt pour savoir si l'espèce survivra, l'année 2012 a été porteuse d'espoir pour le projet. Les efforts de restauration déployés à la plage Wickaninnish ont grandement porté fruit et des centaines de plantes ont fleuri, générant des milliers de graines pour la banque de semences locale. On s'attend à ce que certaines plantes survivent à l'hiver, ce qui constituerait un signe encourageant que les efforts de restauration sur le site seront couronnés de succès. De plus, l'Agence Parcs Canada a établi un partenariat avec la Première Nation Huu-ay-aht pour œuvrer à un troisième site de restauration situé à Keeha Beach, une terre visée par un traité appartenant à la Première Nation Huu-ay-aht . L'Agence Parcs Canada est reconnaissant envers la Première Nation Huu-ay-aht pour leur soutien et leur participation aux efforts de restauration, étant donné que Keeha Beach constitue l'un des meilleurs lieux pour l'habitat de l'abronie rose. Avec les activités de restauration entreprises à Keeha Beach en 2012, l'Agence Parcs Canada a maintenant atteint l'objectif de son programme de rétablissement et a établi trois populations, posant un jalon important vers l'éloignement de cette espèce du spectre de la disparition.


Des membres de l'équipe de restauration de l'abronie rose de la réserve de parc national du Canada Pacific Rim mettant en terre des plantules de cette plante menacée d'extinction à Keeha Beach, près de Bamfield, Colombie-Britannique. © Agence Parcs Canada. Photo : Ross Vennesland

Des membres de l'équipe de restauration de l'abronie rose de la réserve de parc national du Canada Pacific Rim mettant en terre des plantules de cette plante menacée d'extinction à Keeha Beach, près de Bamfield, Colombie-Britannique.

Sauvetage d'un jeune rorqual à bosse

Le 3 septembre 2012, un membre du réseau d'intervention auprès des mammifères marins de la Colombie-Britannique, exploitant Rendezvous Dive, une entreprise de plongée nolisée dans le détroit de Barkley, emmenait un groupe en plongée lorsqu'il a aperçu une mère rorqual à bosse et ses deux petits. Le groupe a remarqué que des flotteurs de casiers à crabes commerciaux obstruaient les mouvements d'un des petits. Le fil à l'extrémité des casiers entrait profondément dans la chair de l'animal, le mettant en difficulté. Le groupe a immédiatement téléphoné à la ligne directe 24 heures du Programme d'intervention auprès des mammifères marins de Pêches et Océans Canada qui a fait appel à l'équipe d'intervention rapide d'experts chargée de dépêtrer les cétacés. En moins de deux heures, des agents de protection et de conservation étaient sur place à la recherche du rorqual empêtré. Le petit rorqual empêtré et sa mère ont été localisés après plusieurs heures de recherches. Plus de trois heures d'efforts intenses ont été nécessaires afin de dépêtrer le petit des lignes qui l'encombraient. La mère, mesurant 45 pieds de long, est restée aux côtés de son petit pendant toute la durée du sauvetage. Bien que les blessures causées par les lignes aient été importantes, on croit que le petit pourra en guérir complètement. Les chercheurs auront recours à des photos d'identification de la nageoire caudale afin de mesurer l'état d'avancement du petit pour les années à venir.


Un membre de l'équipe d'intervention auprès des mammifères marins de Pêches et Océans Canada coupe les lignes de casiers de crabes pour libérer le rorqual à bosse. © Pêches et Océans Canada

Un membre de l'équipe d'intervention auprès des mammifères marins de Pêches et Océans Canada coupe les lignes de casiers de crabes pour libérer le rorqual à bosse.

5.2.2 Autres activités de rétablissement

5.2.2.1 Programme d'intendance de l'habitat

Le Programme d'intendance de l'habitat (PIH) pour les espèces en péril du gouvernement fédéral a été créé en 2000 dans le cadre de la Stratégie nationale pour la protection des espèces en péril. Le but du programme est de contribuer au rétablissement des espèces en péril en faisant participer la population canadienne à des mesures de conservation qui contribuent au rétablissement des espèces sauvages, la priorité étant accordée aux espèces visées par la LEP considérées comme menacées ou en voie de disparition. Les projets financés portent sur quatre résultats attendus :

Le Programme d'intendance de l'habitat est cogéré par Environnement Canada, Pêches et Océans Canada et l'Agence Parcs Canada. Il est administré à l'échelle régionale par Environnement Canada. Les conseils régionaux de mise en œuvre regroupent des représentants des deux ministères et de l'Agence, des gouvernements provinciaux et territoriaux et d'autres intervenants, au besoin. Les conseils donnent leur avis sur l'orientation générale du programme. Ils se prononcent notamment sur les priorités à définir et la sélection des projets pour leur région respective. Depuis sa création en 2000, le Programme d'intendance de l'habitat a fourni plus de 117 millions de dollars à 2047 projets, générant en contrepartie des investissements supplémentaires de 287 millions de dollars des partenaires des projets.

Pendant la douzième année du programme (2011-2012), 195 nouveaux projets et 13 projets pluriannuels approuvés antérieurement, concernant 151 bénéficiaires de financement, ont contribué au rétablissement de plus de 330 espèces visées par la LEP au Canada. Ces projets ont reçu au total 11,5 millions de dollars, cette somme ayant généré en contrepartie des investissements additionnels de 25,9 millions, pour un investissement total de 37,4 millions de dollars. Ces contributions ont appuyé des activités d'intendance au pays qui ont permis d'acquérir et de protéger 364 142 hectares (ha) de terres dont 7562 ha par des moyens exécutoires comme l'acquisition de servitudes de conservation. En outre, 356 580 hectares ont été protégés par le biais d'accords non exécutoires : 322 647 hectares par le biais d'accords d'intendance renouvelés et 33 933 hectares par le biais de nouveaux accords d'intendance. Le programme a aussi permis d'améliorer ou de restaurer 14 511 hectares de terres et 49 kilomètres de littoral.

Restauration de l'habitat riverain pour les espèces en péril du sud de l'Okanagan et de la vallée de Similkameen – The Nature Trust of British Columbia (la fondation pour la nature de la Colombie-Britannique)

Dans le sud de l'Okanagan et dans la région de Lower Similkameen en Colombie-Britannique, seulement 13 % de l'habitat riverain original de la Paruline polyglotte, du Petit-duc des montagnes et de la salamandre tigrée, toutes des espèces en voie de disparition, demeure intact. Ce projet, financé par le Programme d'intendance de l'habitat, a pour but de protéger et de restaurer des sites de nidification et de reproduction présents dans ces écosystèmes riverains afin d'assurer la présence d'habitat nécessaire au rétablissement de ces espèces inscrites, entre autres.

La dégradation et la perturbation de l'habitat riverain causés par l'activité humaine constituant les principales menaces pesant sur les espèces visées par le projet, les activités du projet ont donc été menées en collaboration sur des terres privées, des terres publiques provinciales et des réserves de Premières Nations, autant de lieux où peu de mécanismes pour la protection de ces habitats sont en place. À la fin du projet, 6 hectares d'habitat riverain clé ont été protégés et améliorés grâce à l'installation de 2500 mètres de clôture dans cinq sites et grâce à l'élimination des plantes envahissantes dans six sites. Des panneaux de signalisation ont également été installés sur les sites du projet afin de sensibiliser le public aux activités de rétablissement en cours. Parallèlement, la collaboration de propriétaires fonciers n'ayant pas encore été joints a été sollicitée afin de les encourager à participer, sur une base volontaire, au rétablissement de l'habitat riverain essentiel présent sur leurs terres.

La fondation pour la nature de la Colombie-Britannique est en charge du programme de remise en état de l'habitat des espèces en péril du sud de l'Okanagan et de la vallée de Similkameen depuis plus de 10 ans. Le nombre d'emplacements concernés par le projet ayant été volontairement offerts par les propriétaires fonciers et le nombre d'habitats d'espèces en péril protégés constituent autant de gages de succès du programme. Il remporte un tel succès auprès de la collectivité que la fondation pour la nature ne suffit pas à la tâche tant les propriétaires fonciers intéressés à protéger l'habitat des espèces en péril sur leurs terres sont nombreux. Au cours du projet de 2011-2012, la présence avérée d'espèces visées sur les sites du projet, y compris la Paruline polyglotte est très encourageante. La surveillance continue de la réaction des espèces végétales et aviaires au projet guidera la sélection des méthodes de protection et des sites des projets futurs, à l'avantage de l'ensemble du programme.

5.2.2.2 Fonds interministériel pour le rétablissement

Le Fonds interministériel pour le rétablissement (FIR), administré par Environnement Canada, fait partie de la Stratégie nationale pour la protection des espèces en péril. Créé en 2002, le Fonds interministériel pour le rétablissement soutient les ministères, les organismes gouvernementaux et les sociétés d'État dans leurs efforts visant à respecter les exigences de la LEP. Les projets financés doivent être exécutés principalement sur le territoire domanial ou sur des terres relevant de la compétence d'organisations fédérales autres que les ministères compétents qui se partagent la responsabilité de l'application de la LEP, et concerner directement la mise en œuvre d'activités menées dans le cadre des programmes de rétablissement ou des plans d'action, ou la réalisation de relevés d'espèces en péril. En ce qui concerne les relevés et les projets de rétablissement, la priorité est accordée aux espèces inscrites à la LEP qui ont été désignées « en voie de disparition » ou « menacées ». Depuis 2009, le Fonds interministériel pour le rétablissement soutient également des activités qui aident les organismes fédéraux à préparer des propositions de grande qualité pour ce qui est des relevés et des activités de rétablissement.

Au cours de ses dix premières années d'existence (de 2002 à 2012), le Fonds interministériel pour le rétablissement a financé 596 projets, ce qui représente un investissement total de 18 millions de dollars. En 2011-2012, le Fonds interministériel pour le rétablissement a versé 1,34 million de dollars à 41 projets en appui au rétablissement de 122 espèces (voir au tableau 9 ci-après la ventilation par organisme fédéral). Cet investissement se répartit comme suit : 68 % des fonds ont été affectés à des mesures de rétablissement, 29 % à la réalisation de relevés et 3 % à un projet de planification. Les projets ont été mis en œuvre par neuf ministères fédéraux et trois sociétés d'État ou organismes qui ont investi 1 091 968 dollars supplémentaires (en espèces ou en nature) pour les projets de 2011-2012. L'allocation prévue pour l'exercice 2012-2013 est de 1,2 million de dollars.

Tableau 9 : Dépenses du Fonds interministériel pour le rétablissement par organisme fédéral au cours de l'exercice 2011-2012
Organisme responsable Nombre de projets Fonds interministériel
pour le rétablissement ($)
Total
41
1 335 235
Ministère de la Défense nationale
8
273 627
Affaires autochtones et Développement du Nord Canada
9
234 675
Agriculture et Agroalimentaire Canada
4
227 675
Environnement Canada
4
191 750
Transports Canada
3
160 850
Conseil national de recherches du Canada
6
62 988
Ressources naturelles Canada
1
49 350
Énergie atomique du Canada Limitée
2
38 000
Commission de la capitale nationale
1
37 920
Musée canadien de la nature
1
30 000
Pêches et Océans Canada
1
15 000
Agence Parcs Canada
1
13 400

 

Rétablissement : translocations expérimentales du rat kangourou d'Ord – Ministère de la Défense nationale

Le rat kangourou d'Ord (Dipodomys ordii) est un petit rongeur nocturne adapté à l'habitat dégagé des régions arides. Cette espèce atteint la limite septentrionale de son aire de répartition au Canada où elle est isolée des populations les plus proches du Montana par une distance de 270 km. La récente analyse de la viabilité des populations de l'espèce en Alberta a révélé que deux populations éloignées en Alberta sont grandement menacées de disparition du pays. Le rat kangourou d'Ord est désormais reconnu comme une espèce en voie de disparition, tant à l'échelle provinciale en vertu de la Wildlife Act de l'Alberta qu'à l'échelle fédérale en vertu de la Loi sur les espèces en péril. Ces populations éloignées vivent dans l'habitat de la plus haute qualité en Alberta mais, en raison de leur taille limitée et de leur isolement extrême par rapport à la population la plus proche aux États-Unis, elles présentent une faible probabilité de survie dans un avenir proche, à moins de parvenir à réaliser un sauvetage « écologique » par voie de translocation. La translocation implique la capture, le transport et la libération ou l'introduction de l'espèce d'un endroit à un autre. Bien que l'efficacité de la translocation pour freiner le déclin de cette population n'ait pas été démontrée, la méthode est reconnue comme un outil de gestion viable.

Ce projet, financé par le Fonds interministériel pour le rétablissement, a porté sur une population de rats kangourous d'Ord à la Base des Forces canadiennes Suffield, en Alberta. Le projet avait pour objectif la translocation expérimentale du rat kangourou d'Ord à partir de sites sources appropriés et le suivi de leur réaction par le biais de transpondeurs passifs intégrés une fois au site cible de réinstallation, sur la Base des Forces canadiennes Suffield. Les recherches menées sur la translocation des rats kangourous d'Ord dans un habitat convenable sont considérées comme une activité de priorité moyenne dans le cadre du programme de rétablissement du rat kangourou d'Ord au Canada. Cette étude a permis de faire valoir une approche réussie pour la translocation d'individus des sites sources aux sites cibles.


Rat kangourou d'Ord © Musée provincial de l'Alberta

Rat kangourou d'Ord
5.2.2.3 Fonds autochtone pour les espèces en péril

Le programme du Fonds autochtone pour les espèces en péril (FAEP) permet aux organisations et aux communautés autochtones de tout le Canada de participer aux efforts de protection et de rétablissement des espèces protégées en vertu de la LEP et des espèces en péril désignées par le COSEPAC. Le programme contribue aussi à la protection et à la restauration de l'habitat essentiel ou de l'habitat important des espèces en péril qui se trouvent dans les réserves des Premières Nations ou autour des réserves, ou encore dans les terres et les eaux utilisées traditionnellement par les Autochtones. Le programme est cogéré par Environnement Canada, Pêches et Océans Canada et l'Agence Parcs Canada, avec l'appui d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada et les conseils des organisations autochtones nationales. Environnement Canada et Pêches et Océans Canada se partagent les responsabilités liées à l'administration du projet.

En tout, depuis sa création en 2004, le programme du Fonds autochtone pour les espèces en péril a fourni près de 20 millions de dollars à 600 projets, générant en contrepartie des investissements supplémentaires de 13 millions de dollars des partenaires des projets. Au cours de l'exercice 2011-2012, le programme du Fonds autochtone pour les espèces en péril a versé près de 3,2 millions de dollars à 87 projets, dont un montant d'environ 1,04 million de dollars à des projets ciblant les espèces aquatiques en péril. Ces projets ont entraîné des investissements additionnels de plus de 2,6 millions de dollars (en espèces et en nature). Les projets ont suscité la participation de 76 communautés et organismes autochtones et ont profité à 186 espèces inscrites à la Loi sur les espèces en péril grâce à la sensibilisation accrue des Autochtones aux espèces en péril, à l'élaboration de stratégies, de directives et de pratiques, à la réalisation d'activités de suivi, de relevés et d'inventaires.

Projet d'inventaire des espèces en péril et de renforcement des capacités de la Première Nation non cédée des Chippewas de Nawash

L'objectif de cette initiative est de renforcer la capacité à long terme de la Première Nation non cédée des Chippewas de Nawash à proximité de Wiarton (Ontario) à mettre en œuvre les activités de rétablissement énoncées dans un certain nombre de programmes de rétablissement. Ce projet, financé par le Fonds autochtone pour les espèces en péril, a contribué à l'atténuation des menaces pour l'habitat et plus de 20 espèces en péril inscrites visées par la LEP par des activités d'amélioration de l'habitat (p. ex., l'élimination des espèces envahissantes, la modification des sentiers afin d'éloigner ces derniers des habitats sensibles), d'éducation (visites d'écoles élémentaires, diffusion de matériel d'intendance) et de sensibilisation (interprétation du patrimoine naturel et culturel).

La Première Nation non cédée des Chippewas de Nawash a formé les bénévoles de « Keepers of the Earth » (gardiens de la Terre) à la restauration de l'habitat, aux différentes techniques de collecte de données sur le terrain, à l'enregistrement de données, à la surveillance des espèces et aux activités de sensibilisation des collectivités aux espèces en péril, y compris les espèces en voie de disparition (le noyer cendré et la gérardie de Gattinger), les espèces menacées (la tortue mouchetée, le chardon de Hill, l'iris lacustre et le crotale massasauga) et les espèces préoccupantes (l'arnoglosse plantain et la scolopendre d'Amérique). Les observations relatives aux espèces en péril ont été enregistrées et confirmées par le coordonnateur de projet.

Les espèces envahissantes ont constitué une menace importante pour les espèces en péril de l'alvar de Prairie Point, une plaine calcaire avec peu ou pas de plantes recouvrant le sol située dans la réserve de la Première Nation. En 2011-2012, à la suite des résultats positifs des travaux appuyés par le précédent financement du Fonds autochtone pour les espèces en péril qui portaient sur l'élimination des plantes envahissantes, le mélilot blanc a été éliminé sur un hectare de l'alvar. Ces travaux ont mené à des discussions entre le chef et le conseil ainsi qu'entre la collectivité et d'autres experts afin de faire l'ébauche d'un plan de gestion et de restauration des espèces envahissantes. La mise en œuvre des recommandations visées par le plan a commencé en 2012 sur l'alvar de Prairie Point.

Ce projet a eu pour effet d'accroître la participation et les connaissances de la collectivité à l'égard de la réserve de la Première Nation. De plus, la prise de conscience et la participation croissantes de la collectivité à ce projet produisent de résultats concrets : les observations d'espèces en péril sont désormais couramment signalées dans le secteur du projet.


Une bénévole participant à l'élimination du mélilot blanc dans l'alvar de Prairie Point. © Jarma Jalavo

Une bénévole participant à l'élimination du mélilot blanc dans l'alvar de Prairie Point.
5.2.2.4 Programme de conservation des zones naturelles

Le Programme de conservation des zones naturelles a été créé par le gouvernement du Canada en 2007 grâce à un investissement de 225 millions de dollars aux fins d'une protection durable de plus de 200 000 ha (un demi-million d'acres) de terres abritant des écosystèmes, une faune et des habitats naturels diversifiés. Le programme est administré par Conservation de la nature Canada (CNC) qui, en collaboration avec des organisations non gouvernementales et à but non lucratif vouées à la conservation, utilise les fonds pour acquérir, en tout ou en partie, des terres situées sur des terrains privés dans tout le sud du Canada abritant de grandes zones naturelles écosensibles.

En utilisant des processus fondés sur les sciences, Conservation de la nature Canada et ses partenaires travaillent dans le but de faire l'acquisition de ces terres par l'intermédiaire de dons, d'achats ou d'accords d'intendance avec les propriétaires fonciers. Dans le cadre du Programme de conservation des zones naturelles, la priorité est donnée aux terres qui ont une importance à l'échelle nationale ou provinciale, qui protègent l'habitat des espèces en péril et des oiseaux migrateurs ou qui améliorent la connectivité ou les corridors entre les zones protégées existantes comme les réserves nationales de faune, les parcs nationaux et les refuges d'oiseaux migrateurs.

Le programme comporte une exigence de 1 pour 1, ce qui signifie que chaque dollar versé par le gouvernement fédéral devra être égalé, au minimum, par un dollar de Conservation de la nature Canada en association avec ses partenaires. Jusqu'à présent, les contributions au programme de Conservation de la nature Canada et de ses partenaires s'élèvent à plus de 350 millions de dollars, sous forme de fonds de contrepartie, de promesses de dons et de dons provenant de propriétaires fonciers. Depuis décembre 2012, plus de 354 000 hectares de terres importantes sur le plan écologique ont été acquis dans le cadre du Programme de conservation des zones naturelles. L'objectif de préservation des terres fixé dans les ententes de financement a été dépassé grâce à l'achat de grandes propriétés ou de droits de développement sur de grandes superficies. Le Programme de conservation des zones naturelles a contribué également à la protection de l'habitat d'au moins 146 espèces en péril différentes et d'autres éléments de la biodiversité.

5.2.2.5 Sensibilisation et éducation

La LEP reconnaît que tous les Canadiens et toutes les Canadiennes ont un rôle à jouer dans la conservation des espèces sauvages, y compris dans la prévention de leur disparition du pays ou de la planète. La LEP reconnaît également que les efforts de conservation des Canadiens et des collectivités devraient être encouragés et que les activités d'intendance visant la conservation des espèces sauvages et de leur habitat devraient bénéficier de l'appui voulu pour éviter que ces espèces ne deviennent des espèces en péril. La LEP encourage l'intendance et la collaboration par le biais de programmes de financement et de programmes conjoints visant les espèces en péril. La sensibilisation constitue une part importante des projets soutenus dans le cadre des programmes de financement concernant les espèces en péril.

Environnement Canada a aussi continué d'informer les Canadiens et les Canadiennes au sujet des espèces en péril par son partenariat de longue date avec la Fédération canadienne de la faune dans l'administration du programme « Faune et flore du pays » et par l'élaboration de profils d'espèces et leur publication dans le Registre public des espèces en péril.

Pêches et Océans Canada continue à investir dans des activités d'éducation et de sensibilisation clés pour mieux informer les Canadiens et les Canadiennes sur les espèces aquatiques en péril et mieux les sensibiliser à leurs responsabilités en vertu de la LEP. Par exemple, en 2012, Pêches et Océans Canada a tenu plusieurs séances d'information sur les espèces aquatiques en péril dans les collectivités du sud de l'Ontario. L'objectif était d'améliorer le niveau de sensibilisation des collectivités et leur compréhension de la LEP et plus particulièrement des enjeux liés aux ordonnances de protection des habitats essentiels. Toutes les séances d'information ont été menées avec la collaboration du personnel de l'office de protection de la nature de l'Ontario. Plus de 320 participants ont assisté aux séances d'information.

Pêches et Océans Canada a aussi organisé un atelier de sensibilisation de trois jours sur le commerce des pêcheries et sur la LEP avec du personnel d'application de la loi du ministère des Richesses naturelles de l'Ontario. Les trois jours ont porté sur l'identification de base des espèces (autant les espèces envahissantes que celles inscrites à la LEP) et deux demi-journées ont été consacrées à la visite de marchés de poisson de la région du Grand Toronto. L'objectif était d'informer le personnel d'application de la loi sur les marchés locaux de produits de la mer, endroits potentiellement propices à la revente de prises illégales d'espèces inscrites à la LEP.

Pêches et Océans Canada a étudié plus de 70 marchés en 2012, amassant des renseignements sur ces derniers. Ces efforts concertés ont permis aux organismes fédéraux et provinciaux chargés de l'application de la loi d'étendre leurs capacités ainsi que d'établir des bases solides pour les partenariats à venir et pour la mise en commun future de l'information concernant les espèces en péril.

Les activités de sensibilisation et d'éducation relatives aux espèces en péril menées par l'Agence Parcs Canada ont lieu à l'échelle locale et régionale, dans les aires patrimoniales et autour de celles-ci, là où la compréhension des espèces dans l'environnement immédiat des collectivités locales et des parcs nationaux est valorisée.

À l'échelle nationale, les efforts de sensibilisation ciblent un auditoire urbain qui méconnaît peut-être l'Agence Parcs Canada et les défis auxquels l'organisme fait face. En 2012, des efforts ont été consacrés à la sensibilisation auprès des jeunes, des familles et des nouveaux arrivants dans les trois plus grandes villes du Canada (Montréal, Toronto et Vancouver) et dans quelques autres régions urbaines du pays. L'objectif était d'établir un premier contact avec ces publics et de les amener à comprendre la valeur des aires protégées, les difficultés auxquelles elles font face et les espèces en péril qu'elles abritent. Ces actions mènent à un soutien quant à la protection et à la gestion des espèces en péril au Canada.

5 Le paragraphe 61(1) de la LEP stipule qu'il est interdit de détruire un élément de l'habitat essentiel d'une espèce en voie de disparition inscrite ou d'une espèce menacée inscrite se trouvant dans une province ou un territoire, ailleurs que sur le territoire domanial.

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