Lamproie du ruisseau Morrison (Lampetra richardsoni var. marifuga) programme de rétablissement : chapitre 5


L'habitat

4. Les caractéristiques de l’habitat

Les données actuelles et passées n'offrent aucune information sur la qualité et la quantité de l'habitat de la lamproie du ruisseau de Morrison, si bien qu'on ne connaît pas ses caractéristiques. Il est vraisemblable de croire que l'habitude d'utilisation des terres, la déviation des cours d'eau et d'autres actions anthropiques ont réduit d'une certaine façon le nombre d'habitats et leur qualité, mais il est difficile de quantifier l'ordre de grandeur de ce déclin. De façon générale, on a enregistré à une expansion considérable du développement domiciliaire et commercial dans la partie inférieure du ruisseau tandis que la partie supérieure du bassin a été la cible de l'activité forestière passée et présente ainsi que l'exploitation minière. Le village de Cumberland a récemment repoussé ses frontières pour inclure la moitié du bassin hydrologique supérieur du ruisseau Morrison. (Ellefson 2003). Cet agrandissement favorisera sans doute l'urbanisation du bassin, qui sera accompagné d'une perte ou du moins d'une dégradation de l'habitat aquatique. Cette expansion est susceptible d'accroître l'urbanisation, ce qui est très préoccupant et il nous faut aborder la question si nous voulons protéger adéquatement la lamproie du ruisseau Morrison. Dans certaines parties du courant dominant du ruisseau Morrison, les impacts de l'aménagement du territoire sont évidents; des rives ont été détériorées et on a noté une réduction des ensembles de fosses et rapides (B. Allen, communication personnelle cité dans Beamish et al. 1999). L'eau souterraine provenant des terrains d'enfouissement du lac Pidgeon se déverse en partie dans le ruisseau Morrison, sans compter qu'on s'inquiète que le lixiviat provenant des anciennes mines continue de détériorer la qualité de l'eau (J. Palmer, comm. pers.).

Dans le cours supérieur du ruisseau Morrison, on retrouve deux zones de conservation de l'environnement. Beecher Linton a fait un don de 9,66 hectares de marais regroupant une partie du courant dominant du ruisseau Morrison et des sections de sept affluents. De plus, Comox Timber Ltd. a construit deux canaux d'amélioration de l'habitat du poisson couvrant un total de 2,8 hectares (Ellefson 2003).

La partie supérieure du bassin hydrologique est en grande partie rurale, la seconde croissance de la terre forestière est gérée présentement par son propriétaire Hancock Timber Resources. Il semblerait que cette terre serait en voie d'être vendue (J. Palmer, comm. pers.). La partie inférieure du ruisseau Morrison est très urbanisée mais demeure intacte et plutôt saine.

5. La protection de l’habitat

Il n'existe pas de disposition particulière pour la protection de l'habitat pour la lamproie du ruisseau Morrison, cependant l'espèce profite des avantages des lois existantes (Loi sur les pêches) qui protègent l'habitat des poissons en général. De plus, le règlement sur les zones riveraines de la Fish Protection Act (C.-B.) exige des administrations municipales qu'elles protègent les habitats riverains de l'expansion urbaine, le Water Act (C.-B.) réglemente toute proposition de travail « dans et aux abords d'un ruisseau » et les dispositions de la loi provinciale sur les forêts aborde la question de la protection de l'habitat dans l'exploitation forestière sur les terres privées. Les lamproies profiteront vraisemblablement de la protection de l'habitat et des efforts d'amélioration visant les autres espèces de poissons. Elles comprennent deux zones de conservation environnementale pour l'habitat du poisson sur le cours supérieur du ruisseau Morrison, un lot de 9,66 acres couvrant les marécages, le courant dominant du ruisseau Morrison et des parties de sept affluents (données par Beecher Linton) et deux autres zones semblables pour l'habitat du poisson de 2,9 acres (donnés par Comox Timber Ltd.).

La Loi sur les pêches offre une protection légale au poisson et à son habitat et s'appliquerait en grande partie au ruisseau Morrison. La Loi sur les espèces en péril comporte des interdictions qui protègent les lamproies individuelles, leurs résidences et les habitats essentiels.

6. L’habitat essentiel

Le repérage et la protection de l'habitat essentiel sont primordiaux pour la gestion des espèces en péril. La définition de l'habitat essentiel est un des aspects les plus ambitieux de la gestion de l'espèce puisqu'on parle en fait d'assurer la survie à long terme de l'espèce. C'est dans cet esprit que la législation sur les espèces en péril en a fait sa pierre d'achoppement, en particulier la Loi sur les espèces en péril (LEP), où l'habitat essentiel est défini ainsi :

« … l'habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d'une espèce sauvage inscrite, qui est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d'action élaboré à l'égard de l'espèce. » [a. 2(1)]

Les scientifiques, les gestionnaires de ressources et le grand public conviennent d'emblée du besoin de désigner et de protéger l'habitat essentiel. En dépit de sa complexité, la question fondamentale demeure la même pour toutes les espèces : pour déterminer le rôle de l'habitat dans la restriction de la population et répondre à la question « Quelle est l'ampleur de l'habitat nécessaire à la survie et au rétablissement d'une espèce sauvage inscrite sur la liste des espèces en péril? »

6.1 Repérage de l'habitat essentiel d'une espèce

À la présente étape de notre rapport, il est possible d'indiquer certains habitats importants. Par exemple, on sait qu'en tant qu'ammocètes du ruisseau Morrison, les lamproies habitent les sédiments fins, souvent le long des bords du ruisseau et dans les petites et peu profondes pentes des affluents. On sait également que pendant la saison du frai, la lamproie du ruisseau Morrison se rend dans des lits de gravillons en eau peu profonde pour y aménager leurs nids. De toute évidence, ces habitats ou certains d'entre eux pourraient figurer dans la désignation de l'habitat essentiel. Cependant, en raison de lacunes en information, nous sommes dans l'impossibilité de présenter une démarcation que nous pourrions défendre de l'habitat essentiel à ce moment-ci de notre étude.

6.2 Échéancier des études

On en sait très peu sur la lamproie du ruisseau Morrison. Nous proposons donc d'entreprendre une série de travaux pour définir la délimitation dans la nature de l'habitat essentiel pour la lamproie du ruisseau Morrison. La nature précise de chaque travail sera élaborée dans un ou plusieurs plans d'action.

L'utilisation de l'habitat. -- La première tâche consistera à chercher à mieux comprendre l'utilisation de l'habitat que font les lamproies à différentes étapes de leur cycle biologique. Une description des associations de base à l'habitat pour chaque étape du cycle biologique est une information fondamentale nécessaire à la définition de l'habitat essentiel (Rosenfeld and Hatfield 2006). On forme une sorte de consensus sur les types d'habitat utilisés par les ammocètes de la lamproie du ruisseau Morrison et pour les adultes frayant. On aurait tout intérêt à présenter une définition plus précise. Dans la mesure du possible, les exigences de l'habitat seront déterminées en termes de composantes de micro-habitat, à savoir la profondeur, le type de substrat de croissance et les conditions, c'est-à-dire l'eau, la vitesse du courant, etc. Il s'agit d'éléments qui font partie intégrante de cette fonction. L'une est le développement d'outils qui nous permettra d'identifier pour de bon les ammocètes individuels, soit ceux appartenant à la branche des L. richardsoni et les autres descendants de L. richardsoni var. marifuga. Un autre nous permettra de présenter une synthèse et de faire rapport sur l'information recueillie au cours des précédentes recherches, comme celles effectuées par R. Beamish. (Date de départ projetée : 2007; Date d'achèvement projetée : 2008)

La disponibilité de l'habitat. -- La deuxième tâche consiste à passer en revue la disponibilité passée et présente de l'habitat. L'information sur l'étendue et la répartition des types d'habitat différents constituent un élément clé de la délimitation de l'habitat essentiel. Des études sont nécessaires pour décrire l'abondance et la répartition des différents habitats dans la nature. Dans la mesure du possible, on devrait s'aventurer à décrire la disponibilité antérieure de l'habitat afin d'aider à mettre en contexte les conditions existantes et la délimitation finale de l'habitat essentiel. (Date de départ projetée : 2007; Date d'achèvement projetée : 2008)

L'abondance de la population antérieure et présente. -- La troisième tâche consistera à réviser l'abondance de la population antérieure et actuelle dans le cadre du processus d'établissement des cibles de rétablissement. Tant l'abondance actuelle que passée offre un contexte éloquent pour la cible du rétablissement bien qu'il faille reconnaître que l'abondance passée puisse être difficile à déterminer avec précision. Il peut être possible d'évaluer l'abondance historique par l'entremise de l'analyse des données de piégeage recueillies au cours des précédentes enquêtes de R. Beamish. (Date de départ projetée : 2007; Date d'achèvement projetée : 2009)

Les cibles de rétablissement. -- Des cibles clairement précisées de rétablissement de population pour chaque étape du cycle biologique doivent faire partie intégrante de l'identification de l'habitat essentiel parce que la quantité de l'habitat reconnu comme essentiel doit être relié au point de référence de la population (Rosenfeld and Hatfield 2006). Il faudra franchir plusieurs étapes et recueillir plusieurs éléments d'information pour en arriver à établir les cibles de rétablissement. Les cibles de rétablissement pourraient s'appuyer sur la règle de jugement (p. ex. Thomas 1990; IUCN 2001; Reed et al. 2003), les analyses numériques, notamment l'analyse de la viabilité d'une population (PVA; Morris and Doak 2002) ou en utilisant une variété de techniques. Pour des organismes telle la lamproie du ruisseau Morrison, pour laquelle nous détenons relativement peu d'information et en plus que les renseignements additionnels prennent du temps à être colligés, il serait préférable d'utiliser des règles de jugement. Cependant, il est tout de même intéressant d'examiner de telles cibles en évaluant les paramètres clés de la population (p. ex. la survie et la fécondité) et d'entreprendre la modélisation spécifique de la population (p. ex. l'analyse sur l'élasticité, se reporter à Gross et al. 2002) pour découvrir quelles étapes du cycle biologique sont les plus limitatives pour l'abondance de la lamproie. Il sera nécessaire d'établir des cibles pour chaque étape importante du cycle biologique (Rosenfeld and Hatfield 2006). (Date de départ projetée : 2007; Date d'achèvement projetée : 2008)

Le rapport entre l'habitat et l'abondance. -- La désignation de l'habitat essentiel requiert un rapport quantitatif entre l'habitat et l'abondance parce que ce ratio est indispensable à la détermination du volume de l'habitat requis pour atteindre la cible de rétablissement de la population. (Rosenfeld and Hatfield 2006). La mise au point d'un tel rapport n'est pas un exercice aussi simple qu'il y paraît et pourrait devoir dépendre, en partie du moins, du jugement d'experts. (Date de départ projetée : 2007; Date d'achèvement projetée : 2009)

La définition d'un habitat essentiel. -- La dernière étape de la délimitation de l'habitat essentiel revient à utiliser les cibles de population et le rapport entre les types d'habitat et l'abondance pour déterminer la partie des différents habitats requise pour maintenir viable une population de lamproies du ruisseau Morrison, puis identifier les endroits spécifiques de ces habitats en pleine nature. (Date de départ projetée : 2007; Date d'achèvement projetée : 2010)

6.3 Exemples d'activités pouvant entraîner la destruction de l'habitat essentiel

Tant que l'habitat essentiel n'a pas été formellement délimité, il est impossible de fournir des directives précises sur les types d'activités qui sont les plus susceptibles de détruire l'habitat essentiel, autrement qu'en usant de termes très généraux. Par exemple, les lamproies ont des exigences au niveau de l'habitat similaires sur plusieurs points à celles des salmonidés, donc on peut s'attendre à ce que les activités ayant comme conséquence la dégradation de l'habitat des salmonidés pourraient avoir les mêmes effets sur les lamproies. Nous abordons dans la Partie 3 les menaces plus générales à certains types d'habitat importants pour la lamproie du ruisseau Morrison. Ces menaces et ces activités devraient être évaluées pour leurs répercussions sur l'habitat essentiel et les mesures nécessaires pour atténuer leurs effets négatifs.

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