Bec-croisé des sapins, sous-espèce percna (Loxia curvirostra) programme de rétablissement : chapitre 6

HABITAT ESSENTIEL

Le terme « habitat essentiel » est employé tant par la Loi sur les espèces en péril que par l’Endangered Species Act de Terre-Neuve-et-Labrador (« critical habitat »). Cependant, ce terme n’a pas tout à fait le même sens pour les deux compétences. Pour la Loi sur les espèces en péril, le terme habitat essentiel englobe la notion d’habitat essentiel et celle d’habitat de rétablissement. L’Endangered Species Act de Terre-Neuve-et-Labrador fait quant à elle la distinction entre les deux habitats et les définit séparément. 

5.1 Désignation de l’habitat essentiel

Il est pour l’instant impossible de décrire l’habitat essentiel (Loi sur les espèces en péril), et l’habitat de rétablissement et l'habitat essentiel (Endangered Species Act de Terre-Neuve-et-Labrador) (auxquels on réfère ici en utilisant le terme habitat essentiel) du Bec-croisé des sapins de la sous-espèce percna en raison du manque de connaissances concernant sa présence, sa répartition et ses associations à l'habitat. Selon le rapport de situation, la caractéristique clé de l’habitat du Bec-croisé des sapins est la disponibilité à la grandeur de l’île d’une mosaïque de graines de conifères, afin de fournir de nombreuses zones d’habitat de même que les espèces d’arbres produisant la plus grande abondance de cônes les années où la production de cônes échoue dans certaines zones (COSEPAC, 2004). La revue de la documentation n'a pas fourni de modèle pour la description de l’habitat essentiel du Bec-croisé des sapins, mais seulement des descriptions sommaires des associations à l'habitat communes (Benkman, 1993b; Summers et Proctor, 1998; Parchman et Benkman, 2002; COSEPAC, 2004) et la suggestion qu’une mosaïque d’espèces de conifères pourrait être importante pour les usages saisonniers et ceux du cycle vital (Marquiss et Rae, 1994).

Les études sur la répartition et l’habitat des becs-croisés d'Europe montrent que, comme le laissaient prévoir la morphologie du bec et la variation des cônes (Benkman, 1993a), certaines espèces sont plus souvent associées à un conifère qu'à d’autres (Summers et al., 2002). Avant de pouvoir décrire l’habitat essentiel de la sous-espèce percna, il faudra identifier ses associations à l'habitat spécifiques et son utilisation des divers habitats au cours de son cycle vital. Il est probable que l'habitat essentiel ne sera pas cartographié, sauf dans le cas et au moment où un nid sera trouvé. L’habitat essentiel sera plutôt géré au niveau du paysage par exemple, en maintenant un certain pourcentage du paysage forestier où se trouvent des conifères et ce, en formant des alternances spatiales.

5.2 Calendrier des études

Les renseignements et données actuellement disponibles ne sont pas suffisants pour désigner l’habitat essentiel de la sous-espèce percna. Le calendrier des études présenté ci-dessous énumère les mesures qui doivent être prises en vue de désigner l’habitat essentiel de l’espèce ainsi que les échéances qui y sont associées.

Tableau 3. Calendrier des études en vue de désigner l’habitat essentiel du Bec-croisé des sapins de la sous-espèce percna

Activité de recherche Cette activité doit-elle être intégrée au plan d’action? Mesures spécifiques Échéancier
Identifier les associations à l'habitat et l'utilisation de l'habitat. Oui Cartographier les zones de conifères selon l’espèce et la classe d’âge. 2006
Évaluer annuellement la production de cônes de chaque espèce sur toute l’île. Annuellement
Cartographier les zones où des Becs-croisés des sapins ont été observés et où des nids ont été enregistrés. Annuellement
Communiquer avec les groupes d’ornithologie locaux. Continu
Élaborer des protocoles de relevés. 2006
Tester les protocoles et effectuer des relevés sur le terrain. 2006 et années suivantes
Utiliser les relevés des oiseaux pour déterminer les nouvelles zones de recherche pour le Bec-croisé des sapins. 2007 et années suivantes
Élaborer des modèles d’habitat. Oui Inclure les modèles dans les plans d’action une fois les associations à l’habitat identifiées. Les modèles peuvent être élaborés à partir de cartes du couvert forestier. Début en 2006 puis continu
Élaborer des modèles d’habitat Oui Élaborer des modèles d’habitats à partir de la documentation. 2006-2007
Tester les modèles en intégrant des données de Terre-Neuve. 2007-2008
En se fondant sur les données et les modèles d'habitat, déterminer la quantité d'habitat nécessaire pour atteindre l'objectif du rétablissement. 2009 et années suivantes
Identifier les menaces potentielles à l’habitat et évaluer les impacts dans chaque secteura. Oui Évaluer les impacts potentiels des facteurs naturels et anthropiques exposés à la section 2. À compter de 2008 ou lorsqu’il y aura suffisamment d’information disponible
Déterminer la propriété foncière. Non   2006
Déterminer des techniques appropriées pour la protection. Oui Intégrer aux plans d’action futurs. 2010

a  Les associations à l'habitat devront être connues avant que des travaux soient mis de l’avant pour ce projet. Il faudra également créer des couches SIG additionnelles couvrant notamment la répartition des écureuils et les facteurs limitatifs potentiels. De plus, il serait utile de connaître la réaction comportementale du Bec-croisé des sapins face aux menaces, mais on ignore s’il est possible de recueillir cette information.

5.2.1 Gestion de l’habitat

S’il est prouvé que la perte ou la dégradation de l’habitat contribue au déclin de la sous-espèce percna, il sera alors fondamental de désigner l’habitat essentiel du Bec-croisé des sapins et de réduire immédiatement toute perturbation à l'habitat essentiel de la sous-espèce percna en vue de faciliter le rétablissement. Il faudra protéger suffisamment d’habitat à long terme afin d'accroître la population de la sous-espèce percna de Terre-Neuve.

Sur l’île de Terre-Neuve, 7,8 % des terres et des zones d’eau douce sont protégées soit par la province, soit par le gouvernement fédéral. En plus de ces zones déjà protégées, le rapport de situation (COSEPAC, 2004) estime que certains habitats potentiellement importants pour le Bec-croisé des sapins pourraient être préservés et protégés dans la réserve écologique provisoire du lac Little Grand, dans l’ouest de l’île, réserve à laquelle le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador envisage actuellement d’accorder un statut permanent. À Terre-Neuve, depuis 1999, le pin blanc est déjà protégé en vertu d’une politique provinciale limitant son exploitation. De plus, très peu de permis, s'il en est, sont délivrés pour l’exploitation du pin rouge dans la province (B. English, comm. pers.). La stratégie provinciale pour la gestion durable des forêts lancée en 2003 (Gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador, 2003) insiste également sur l’importance de la protection du pin blanc et du pin rouge pour la conservation à long terme de la diversité biologique.

Plusieurs avenues peuvent être explorées pour protéger l’habitat essentiel à Terre-Neuve. Le Bec-croisé des sapins n’est fidèle à aucun site spécifique; il se disperse plutôt dans le paysage selon la disponibilité de la nourriture. Par conséquent, la philopatrie ne pourra pas servir à déterminer les aires importantes. Une des solutions à privilégier serait le maintien d’une mosaïque de types de peuplements forestiers afin qu’il y ait toujours des ressources alimentaires adéquates pour l’espèce. Une deuxième approche serait de protéger des types d’habitat et/ou des emplacements spécifiques afin que les Becs-croisés des sapins puissent les utiliser. Cependant, il n’y a à l’heure actuelle pas assez d’information sur l’espèce pour déterminer les variables nécessaires à la désignation de tels emplacements.

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