Chevêche des terriers (Athene cunicularia) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 7

Habitat

Besoins en matière d’habitat

La Chevêche des terriers niche dans les paysages ouverts, comme les pâturages en usage, les zones herbeuses des prairies quelquefois parsemées d’armoises, et les bordures des champs cultivés (Poulin et al., 2005). Dans tous ces habitats, c’est dans les zones où la végétation est éparse et le terrain plat et ouvert qu’elle préfère nicher. Au Canada, son habitat est en général la prairie plate dépourvue d’arbres en Alberta et en Saskatchewan, et les prairies des plateaux et des vallées en Colombie-Britannique (Wellicome et Haug, 1995). Une autre importante composante de son habitat est la proximité de terrains où poussent des herbes de hauteur moyenne à élevée pour la recherche de nourriture (surtout nocturne). Le jour, la Chevêche limite généralement sa quête de nourriture aux environs immédiats du nid, mais la nuit, elle élargit son aire d’alimentation jusqu’aux champs avoisinants où la végétation est plus dense (Haug et Oliphant, 1990; Plumpton, 1992; Sissons et al., 2001; Sissons, 2003).

Au Canada, la Chevêche des terriers niche toujours dans des terriers abandonnés de divers mammifères, dont les écureuils terrestres, les chiens de prairie, les blaireaux, les renards, les mouffettes, les coyotes et les marmottes (Wellicome et Haug, 1995; Wellicome, 1997; Poulin et al., 2005), ou dans des terriers artificiels (De Smet, 1997; Wellicome et al., 1997; Leupin et Low, 2001). Elle niche habituellement dans le type de terrier le plus commun qu’on trouve sur place. Dans la région des grandes plaines, elle semble préférer les terriers de chiens de prairie (p. ex. Butts et Lewis, 1982), et son abondance pourrait être liée à l’abondance locale de ces derniers (Desmond et al., 2000). La plupart des populations canadiennes de Chevêches des terriers nichent aujourd’hui dans les terriers abandonnés par les blaireaux et les spermophiles de Richardson (Spermophilus richardsonii), mais privilégient ceux dont l’entrée a la taille du blaireau (Poulin et al., 2005).

La Chevêche des terriers passe en général la journée près de son terrier, mais s’en éloigne la nuit pour chercher sa nourriture (Haug et Oliphant, 1990). La taille moyenne documentée de son domaine vital est de 2,41 km2 en Saskatchewan (Haug et Oliphant, 1990) et de 3,73 km2 en Alberta (Sissons, 2003). Sissons (2003) a montré que ce strigidé passait beaucoup de temps à se nourrir la nuit dans les prés adjacents. La taille du domaine vital est positivement corrélée au pourcentage de l’habitat cultivé environnant, ce qui donne à penser que l’espèce a besoin d’un plus grand domaine lorsque la proportion des terres cultivées est élevée (Haug, 1985; Wellicome et Haug, 1995).


Tendances en matière d’habitat

La superficie de l’habitat de nidification, de migration et d’hivernage convenable (principalement la prairie ouverte) ne cesse de diminuer (voir Telfer, 1992; Hjertaas, 1997; Warnock et Skeel, 2004). Telfer (1992) estime que 39 % des prairies indigènes ont disparu au Canada entre 1949 et 1986. Selon Hjertaas et Lyon (1987), ce sont 21 % de ces prairies qui auraient disparu en Saskatchewan sur une période de 7 ans entre la fin des années 1970 et le début des années 1980. Au Manitoba, au moins 20 % des sites de nidification historiques recensés sur une période de cinq ans ont été détruits par l’agriculture ou l’aménagement urbain (Haug et Churchward, 1988). Selon Warnock et Skeel (2004), la prairie a disparu à un rythme annuel moyen de 6 % entre 1987 et 1993 notamment dans le sud de la Saskatchewan fréquenté par les strigidés. Toutes ces études attribuent la disparition de l’habitat avant tout à la conversion des prairies indigènes en terres cultivées.

Au Canada, la disparition de l’habitat de prairie s’accompagne d’une diminution du nombre d’écureuils terrestres et d’un déclin encore plus rapide de l’abondance de la Chevêche des terriers. En Colombie-Britannique, selon Howie (1980), le principal facteur responsable du déclin de l’espèce est attribuable au déclin des populations de blaireaux (Taxidea taxus jeffersonii). Dans les prairies, il semble que le spermophile de Richardson ait décliné dans certaines parties de l’Alberta (Kirk et Banasch, 1996), de la Saskatchewan (Schmutz et al., 2001) et du Manitoba (K. De Smet, pers. Comm.), mais on ne possède aucune donnée démographique à plus grande échelle (Michener et Schmutz, 2002). La population de Chevêches des terriers dans les quatre provinces de l’Ouest est aujourd’hui si faible que des secteurs abritant des habitats qui pourraient convenir à l’espèce demeurent inoccupés (Skeel et al., 2001, Burrowing Owl Recovery Team Meeting, 2004).


Protection et propriété

Au Canada, la plus grande partie de l’habitat qui convient à la Chevêche des terriers se trouve sur des terrains privés. Pour protéger l’habitat, on a donc mis en place des programmes volontaires d’intendance des terres, dont le Operation Grassland Community en Alberta (http ://www.afga.org/Conservation/ogc.htm; en anglais seulement) et l’Opération Chevêche des terriers (Operation Burrowing Owl [OBO]) en Saskatchewan (http ://www.naturesask.com/OBO/obo.htm; en anglais seulement). Ces programmes invitent les propriétaires à signaler chaque année le nombre de Chevêches des terriers qui se trouvent sur leurs terres, à protéger les aires de nidification contre la culture et l’épandage de pesticides et, éventuellement, à y planter des graminées indigènes au lieu de graminées introduites. En plus de mieux faire connaître les espèces indigènes, ces deux programmes ont aidé à préserver les prairies indigènes (voir par exemple Warnock et Skeel, 2004) et permis de recueillir de précieuses données à long terme pour les activités de surveillance de la Chevêche des terriers.

L’Alberta et la Saskatchewan (T. Wellicome, comm. pers., septembre 2004) s’efforcent actuellement d’identifier et de protéger (au moyen de servitudes d’intendance et de conservation) les habitats essentiels à la Chevêche nicheuse. Il est également capital de protéger l’habitat dans les voies migratoires (États-Unis) et les aires d’hivernage (Mexique), car le rétablissement des populations canadiennes pourrait aussi dépendre des mesures de conservation adoptées dans ces régions.

 

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