Pipit de sprague (Anthus spragueii) : description de la résidence finale

L'article 33 de la Loi sur les espèces en péril (LEP) interdit d'endommager ou de détruire la résidence d’une espèce inscrite comme menacée, en voie de disparition ou disparue du pays. La LEP définit la résidence comme suit : « Gîte -- terrier, nid ou autre aire ou lieu semblable -- occupé ou habituellement occupé par un ou plusieurs individus pendant tout ou partie de leur vie, notamment pendant la reproduction, l'élevage, les haltes migratoires, l'hivernage, l'alimentation ou l'hibernation » [paragraphe 2(1)].

L'interdiction relative à la résidence prend effet de différentes façons, selon la compétence responsable de l’espèce. Étant un oiseau migrateur protégé par la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs (LCOM), le Pipit de Sprague relève de la compétence fédérale. Cela signifie que les interdictions relatives à la résidence sont en vigueur sur tout le territoire canadien dès que l’espèce est ajoutée à la liste officielle des espèces en péril.

La description ci-après de la résidence du Pipit de Sprague (Anthus spragueii) a été produite afin d’accroître la sensibilisation publique et d’aider à l'application de l'interdiction mentionnée précédemment. On sait que les Pipits de Sprague ont une résidence : leur nid.

Information sur l'espèce

Nom commun - Pipit de Sprague

Nom scientifique - Anthus spragueii

Statut du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC) actuel et année de désignation - Menacée (2000)

Présence au Canada - La présence du Pipit de Sprague au Canada est confinée en grande partie aux prairies et aux forêts-parcs à trembles dans les provinces des Prairies1. Au Canada, le Pipit de Sprague se reproduit principalement dans les prairies naturelles depuis les contreforts des Rocheuses dans le sud et le centre de l'Alberta2 jusqu'au centre-ouest et sud-ouest du Manitoba3. Une seule observation de reproduction a été notée pour le centre-sud de la Colombie-Britannique4 (figure 1).

Justification de la désignation - Perte continue de l’habitat de reproduction et population en déclin rapide dans l’ensemble de l’aire de répartition1.

Figure 1. Distribution actuelle connue du Pipit de Sprague (Anthus spragueii) au Canada

Distribution du Pipit de Sprague au Canada (Voir description longue ci-dessous.)
Longue description pour la figure 1

Le Pipit de Sprague est endémique à l’Amérique du Nord, où il niche dans les contreforts des Rocheuses du sud et du centre de l’Alberta, dans le sud-ouest du Manitoba et, vers le sud, dans le sud du Montana, le nord du Dakota du Sud et le nord-ouest du Minnesota (figure 1; Robbins et Dale, 1999). En 1991, une seule mention de reproduction a été rapportée dans la région du Riske Creek, dans le centre-sud de la Colombie-Britannique (McConnell et al., 1993). L’aire de reproduction canadienne du Pipit de Sprague s’est réduite dans les parties orientale et septentrionale de son aire de répartition historique dans les trois provinces (COSEPAC, 2000). Dans l’ensemble, 60 p. 100 de l’aire de reproduction continentale du Pipit de Sprague se trouve dans les Prairies canadiennes (CPPF, 2004). Les pipits hivernent dans le sud-ouest des États-Unis (principalement au Texas, en Louisiane, en Oklahoma, au Nouveau-Mexique et en Arizona) ainsi que dans le nord du Mexique (Robbins et Dale, 1999).

1) Le nid

Aspect physique et contexte

Figure 2. Nid du Pipit de Sprague

Nids typique du Pipit de sprague

Figure 3. Œufs du Pipit de Sprague

Oeuf du Pipit de Sprague

Les nids du Pipit de Sprague sont protégés comme résidence. Les Pipits de Sprague sont le plus répandus dans les prairies naturelles de hauteur et de densité moyenne, avec quelques d'arbustes et de faibles quantités de végétation résiduelle et de déchet végétal1. Il est rare d’observer des Pipits sur des terres cultivées ou dans les endroits à  couverture permanente dense, plantée pour la gestion de la sauvagine ou la conservation des sols1,5,6,7. De plus, il n'y a pas d’observation confirmée de nidification dans ces habitats. Par contre, les Pipits sont souvent observés dans les régions où les herbes indigènes ont été remplacées par des herbes de fourrage introduites (p. ex. prairies de fauche et  pâturages ensemencés), si la composition de la végétation est semblable à celle de la prairie naturelle8,9,10. L'habitat de reproduction devient inadéquat immédiatement après le brûlage, lorsque l'activité du bétail est intense ou lorsque la gestion ou l’absence de gestion produit une végétation haute et dense envahie par des arbustes et des plantes exotiques11,12,13,14. La durée des séquelles varie selon le degré d’humidité, l’état du sol et la fréquence des perturbations exotiques11,14. Les Pipits sont vulnérables à l’état de leur milieu, et construisent leurs nids plus souvent dans des régions de prairie naturelle de plus de 65 ha15. Dans ces prairies, les nids sont situés dans les endroits où on trouve une plus grande quantité de végétation résiduelle (morte) et de grandes herbes (~ 20 cm de hauteur)16,17. Les Pipits évitent de construire leurs nids dans des endroits où une grande partie du terrain est sans végétation ou dans des endroits où la végétation a disparu en raison du broutage, des incendies ou de la tonte16

Le nid est situé dans une dépression creusée dans la terre, habituellement à la base de mottes de terres gazonnées, et est composé d'herbes grossières et fines tressées en coupe11. Les grandes herbes croissant près du nid sont normalement tressées pour former un dôme18(figure 2). Des pistes d’envol sont souvent construites à l'entrée du nid et peuvent s’étendre sur 15 cm de longueur18. En moyenne, l'intérieur du nid est de 7,6 cm de diamètre et 3,8 cm de profondeur; l'entrée est de 5,1 cm19. Les femelles pondent de deux à six œufs (normalement quatre ou cinq), qu’elles couvent pendant 10 à 15 jours1,11,20,21. Les œufs sont de couleur blanc-gris à beige pâle, avec des marques olive-brun à mauve-brun. Ils sont sub-elliptiques ou ovales et mesurent environ 21 x 15 mm11(figure 3).

Fonction

La fonction du nid résidence est d’offrir abri, protection et les conditions propices à la ponte, à l’incubation et à l’éclosion, ainsi que l’élevage des jeunes.

Endommagement et destruction de la résidence

Toute activité qui détruit la fonction du nid (c.-à-d. le lieu utilisé pour la ponte, l'incubation et l'élevage de la couvée) constituerait un acte d’endommagement ou de destruction de la résidence. Les exemples comprennent, entre autres, empêcher l'accès au nid, tondre ou faucher l’herbe, détruire le nid ou enlever la végétation immédiatement adjacente ou au-dessus du nid.

Période et fréquence d'occupation

La construction du nid commence normalement au début ou à la mi-mai et les couvées se constituent généralement de la seconde semaine de mai jusqu'à la fin de juillet, quoique la pondaison puisse se prolonger jusqu'en août11, 22. Les oisillons quittent le nid de 10 à 13 jours après leur éclosion11,20. Le nid n’est utilisé qu’une seule fois et de nouveaux nids sont construits pour les pondaisons suivantes, généralement à une distance de 100 m du premier nid20,23. Le nid est considéré comme une résidence depuis la construction du nid jusqu'à l’envol de tous les oisillons (soit une trentaine de jours entre mai et août).

Renseignements supplémentaires

Références

1 Prescott, D. R. C., et S. K. Davis. 1998. Rapport de situation sur le Pipit de Sprague, Anthus spragueii, au Canada, Comité sur la situation des espèces en péril au Canada.

2 Semenchuk , G. P. (éd.). 1992. The atlas of breeding birds of Alberta,Federation of Alberta Naturalists, Edmonton, AB., 391 pages.

3 Manitoba Avian Research Committee . 2003. The birds of Manitoba, Manitoba Naturalists Society, Winnipeg, Manitoba

4 McConnell, S. D ., R. Van den Driessche, T. D. Hooper, G. L. Roberts, et A. Roberts. 1993. « First occurrence and breeding of Sprague's Pipit, Anthus spragueii, for British Columbia », Canadian Field Naturalists, 107:222-223.

5 Dale, B., et G. McKeating. 1996. « Finding common ground – the nongame evaluation of the North American Waterfowl Management Plan in Canada », p. 258-265, in Proceedings of 7th International Waterfowl Symposium, J.T. Ratti, éditeur, Canards Illimités, Memphis.

6 McMaster, D. G., et S. K. Davis. 2001. « An evaluation of Canada's Permanent Cover Program: habitat for grassland birds? » Journal of Field Ornithology, 72:195-210.

7 Dale, B., M. Norton, C. Downes et B. Collins. Sous presse. « Monitoring as a means to focus research and conservation – the Grassland Bird Monitoring example », Proceedings of Partners in Flight (PIF) conference.

8 Dale, B. C., P. A. Martin et P. S. Taylor. 1997. « Effects of hay management on grassland songbirds in Saskatchewan », Wildlife Society Bulletin, 25:616-626.

9 De Smet, K. D., et M. P. Conrad. 1997. « Management and research needs for Baird's Sparrows and other grassland species in Manitoba », p. 83-86, in Provincial Museum of Alberta Natural History Occasional Paper No. 15: proceedings of the second endangered species and prairie conservation workshop (Holroyd, G. L., G. Burns et H. C. Smith, éd.), Provincial Museum of Alberta Natural History, Edmonton, Alberta

10 Davis, S. K., et D. C. Duncan. 1999. « Grassland songbird occurrence in native and crested wheatgrass pastures of southern Saskatchewan », Studies in Avian Biology, 19:211-218.

11 Robbins, M. B., et B. C. Dale. 1999. « Sprague’s Pipit(Anthus spragueii) », in The Birds of North America, numéro 439 (A. Poole and F. Gill, editors), The Birds of North America, Inc., Philadelphia, PA.

12 Johnson, D. H, L. D. Igl, J.A. Dechant, M. L. Sondreal,. C. M. Goldade, M. P. Nenneman, et B. R. Euliss. 1998. Effects of management practices on grassland birds: Sprague’s Pipit, Northern Prairie Wildlife Research Center, Jamestown, ND, 10 p.

13 Davis, S. K., D. C. Duncan, et M. A. Skeel. 1999. « Distribution and habitat associations of three endemic grassland songbirds in southern Saskatchewan », Wilson Bulletin, 111:389-396.

14 Madden , E.M., R.K. Murphy, A.J. Hansen et L. Murray. 2000. « Models for guiding management of prairie bird habitat in northwestern North Dakota », American Midland Naturalist, 144:377-392.

15 Davis, S. K. 2004. « Detecting area sensitivity of grassland passerines: effects of patch size, patch shape, and vegetation structure on bird abundance and occurrence in southern Saskatchewan », Auk, 121:1130-1145.

16 Davis, S.K. 2003. Habitat selection and demography of mixed-grass prairie songbirds in a fragmented landscape, thèse de doctorat, University of Regina (Saskatchewan).

17 Dieni, J. S., et S. L. Jones.2003. « Grassland songbird nest site selection patterns in northcentral Montana », Wilson Bulletin, 115:388-396.

18 Sutter, G. C. 1997. « Nest-site selection and nest-entrance orientation in Sprague’s Pipit », Wilson Bulletin, 109:462-469.

19 Harris, R. D. 1933. « Observations on a nest of Sprague’s Pipit (Anthus spragueii) », Canadian Field-Naturalist, 47:91-95.

20 Davis, S. K. 2004. « Natural history and demography of Sprague’s Pipit in south-central Saskatchewan: Unpublished data », Service canadien de la faune, Regina (Sask.).

21 Davis, S.K. 2003. « Breeding ecology of mixed-grass prairie songbirds in southern Saskatchewan », Wilson Bulletin, 115:119-130.

22 Davis, S. K . 1994. Cowbird parasitism, predation, and host selection in fragmented grassland of southwestern Manitoba, thèse de maîtrise inédite, University of Manitoba, Winnipeg (Manitoba). 77 pages.

23 Sutter, G. C., D. J. Sawatzky, D. M. Cooper et R. M. Brigham. 1996. « Renesting intervals in Sprague's Pipit, Anthus spragueii», The Canadian Field Naturalist, 110:694-697.

24 Hooper, T. D. 1997. Status of the Sprague's Pipit in British Columbia, B.C. Environment, Wildlife Working Report Numéro WR-88, Victoria, C.-B., 7 pages.

25 Prescott, D. R. C. 1997. Status of the Sprague's Pipit (Anthus spragueii) in Alberta, Alberta Environmental Protection, Wildlife Management Division, Wildlife Status Report Number 10, Edmonton, Alberta, 14 pages.

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