Grand iguane à petites cornes (Phrynosoma hernandesi) évaluation et mise à jour du rapport de situation du COSEPAC : chapitre 3

Information sur l'espèce

Nom et classification

La classification taxinomique des iguanes à petites cornes a été largement remaniée depuis le dernier rapport du COSEPAC (Powell et Russell, 1992b). L'espèce présente en Alberta et en Saskatchewan, autrefois connue sous le nom de phrynosome de Douglas de l'Est, Phrynosoma douglasii brevirostre (Russell et Bauer, 1993a), a été reclassée à la lumière de l'information réunie par Zamudio et al. (1997). Anciennement, tous les iguanes à petites cornes étaient classés sous l'espèce Phrynosoma douglasii. Cette espèce largement répandue était ensuite subdivisée en six sous-espèces, principalement selon des caractéristiques morphologiques (Reeve, 1952). Deux de ces sous-espèces étaient présentes au Canada : Phrynosoma douglasii douglasi, iguane pygmée à cornes courtes, dans le centre-sud de la Colombie-Britannique, et Phrynosoma douglasii brevirostre ou phrynosome de Douglas de l'Est, en Alberta et en Saskatchewan.

Zamudio et al. (1997) ont amassé des données scientifiques et morphologiques justifiant la division de l'espèce Phrynosoma douglasi (sensu lato) en deux espèces distinctes. Les populations situées dans la région Pacific Northwest et auparavant désignées comme la sous-espèce P.d. douglasi, ou petit phrynosome de Douglas, ont été nommées Phrynosoma douglasi (sensu stricto). L'autre ancienne sous-espèce du Phrynosoma douglasi, vivant dans la partie restante de l'aire de répartition et regroupant les populations des grandes Plaines, du plateau du Colorado et des sites de haute altitude dans les montagnes Rocheuses du sud des États-Unis et du Mexique, a été nommée P. hernandezi (Zamudio et al., 1997). La graphie proposée par Zamudio et al. (1997) était fondée sur Hammerson et Smith (1991). Par la suite, Smith et al.(1999) ont réexaminé et corrigé une interprétation antérieure, et le terme « hernandesi » a été généralement accepté.

Zamudio et al. (1997) ont reconnu la possible paraphylie du groupe P. hernandesi, compte tenu des complexes changements climatiques et géologiques qui ont eu lieu dans la partie centrale de son aire de répartition au cours des dernières 20 millions d'années, mais n'ont relevé aucune preuve à l'appui d'une quelconque désignation infraspécifique. Toutefois, au sein du groupe élargi P. hernandesi, deux grands clades se dessinent nettement : l'un centré sur le plateau du Colorado et la région du grand Bassin, et l'autre, plus étendu, englobant pratiquement tout le reste de l'aire de répartition, au sud et à l'est des montagnes Rocheuses (Zamudio et al., 1997). Crother (2000) a proposé des désignations infraspécifiques au sein de l'espèce P. hernandesi et Sherbrooke (2003) a proposé l'existence de cinq sous-espèces, mais celles-ci ne semblent pas avoir été généralement acceptées. Crother (2000) a suggéré que les populations occupant l'Alberta et la Saskatchewan soient nommées Phrynosoma hernandesi hernandesi. En dernière instance, on suggère que l'espèce au Canada soit simplement désignée Phrynosoma hernandesi, conformément aux conclusions de Zamudio et al. (1997).

Une certaine mésentente persiste quant au nom commun anglais de l'espèce, anciennement dénommée « Eastern Short-horned Lizard » (l'ancien nom français est « phrynosome de Douglas de l'Est »). Russell et Bauer (2000) nomment le Phrynosoma hernandesi « Mountain Short-horned Lizard ». Le nom commun reconnu par Sherbrooke (2003) et utilisé par NatureServe (2005) est simplement « Short-horned Lizard ». Stebbins (2003) nomme l'espèce « Greater Short-horned Lizard », tout en reconnaissant l'usage de « Mountain Short-horned Lizard ». Il semble toutefois que l'autorité de Stebbins (2003) en la matière ait influencé la majorité des références dans les publications scientifiques. Il a donc été proposé de faire référence à l'espèce sous le nom commun « Greater Short-horned Lizard » (grand iguane à petites cornes, en français) (Crother, 2000).

Description morphologique

Les iguanes à cornes sont de petits iguanes au camouflage efficace qui portent une rangée d'épines protectrices le long de la crête postérieure de la tête. La taille relative et la position de ces épines diffèrent chez chacune des 17 espèces du genre Phrynosoma actuellement reconnues (Leaché et McGuire, 2006). Tous les iguanes à cornes sont aplatis dorsiventralement et exhibent sur les côtés une frange d'écailles en saillie. Leur tête et leur corps sont larges, et leur queue est courte, ce qui leur donne une apparence trapue et massive. Leur structure physique, leur aspect et leurs dandinements sont probablement à l'origine de leurs surnoms « Horny toad » et « Horned toad » (crapaud à cornes), d'usage fréquent dans les textes populaires de langue anglaise. Bien entendu, en tant que reptiles, ils ont peu en commun avec leurs homologues amphibiens, sauf peut-être certaines proies occasionnelles dans leurs diètes respectives et certains prédateurs.

Les iguanes à petites cornes (Phrynosoma hernandesi) se distinguent, comme leur nom commun l'indique, par une rangée de « cornes » relativement courtes mais bien visibles, et une entaille profonde sans corne sur le derrière de la tête (figure 1; Sherbrooke, 2003; Stebbins, 2003). Ils portent une unique frange d'écailles hérissées le long des flancs (Russell et Bauer, 2000; Sherbrooke, 2003; Stebbins, 2003). Leur coloration varie selon la région, mais elle agit toujours comme un excellent camouflage par rapport au substrat où ils vivent. Leur dos est gris, beige, brun clair ou même rougeâtre moucheté de blanc et est couvert de taches brun foncé, avec une paire de taches très foncées derrière la tête (Russell et Bauer, 2000; Stebbins, 2003). Le ventre est pâle, de couleur beige ou plus pâle encore, et parfois accentué de jaune ou d'orange (Russell et Bauer, 2000; Stebbins, 2003).

Au cours d'études sur le terrain menées en Alberta, Powell et Russell (1985a) ont mesuré une taille du museau au cloaque d'environ 69 mm chez les femelles adultes et d'environ 52 mm chez les mâles adultes. Les mâles de tous âges portent des écailles postanales élargies (Powell et Russell, 1985a), et on note une enflure à la base de la queue durant la saison de reproduction (Stebbins, 2003). En Alberta, le Phrynosoma hernandesi présente un dimorphisme sexuel marqué, les femelles étant beaucoup plus grosses que les mâles (Powell et Russell, 1984; 1985a). Le taux de croissance est le même chez les deux sexes, mais les mâles cessent de croître et atteignent la maturité sexuelle au moins un an avant les femelles (Powell et Russell, 1985a). La femelle adulte non gravide peut atteindre une masse d'environ 18 g, alors que le poids du mâle adulte se stabilise à environ 10 g (Powell et Russell, 1985a).

Figure 1. Illustration du Phrynosoma hernandeside l'Alberta.

 Figure 1. Illustration du Phrynosoma hernandeside l'Alberta.

Description génétique

Les iguanes à petites cornes constituent le groupe le plus répandu de leur genre et les individus exhibent d'importantes différences entre eux. Zamudio et al. (1997) ont recueilli des échantillons tissulaires et ont dérivé des séquences d'ADNmt pour cinq des six sous-espèces de P. douglasii (sensu lato) un peu partout dans l'aire de répartition, aux États-Unis, mais aussi en Alberta. Cette étude a été réalisée à l'échelle de l'espèce et ne visait pas à examiner les variations au niveau des populations à l'échelle régionale. D'après l'arbre phylogénétique produit grâce à cette étude, les plus proches parents infraspécifiques des populations de l'Alberta sont les populations du Dakota du Nord et du Sud, du Montana, du Wyoming et du Nevada (Zamudio et al., 1997). Par conséquent, on estime que l'espèce n'a que récemment, à l'échelle géologique, émigré au Canada à partir de refuges plus méridionaux depuis la dernière glaciation (Zamudio et al., 1997).

Au Canada, on présume qu'il y a un certain degré d'échanges génétiques au sein des principales populations, mais il semble improbable que ces échanges aient lieu entre celles-ci, compte tenu de la petite taille des individus et des distances considérables entre les populations. Les individus présentent des différences de coloration d'une population à l'autre, ce qui refléterait une variation génétique entre les populations (Powell, 1982). En outre, certains des grands bassins hydrographiques auxquels sont associées les populations ne sont pas liés, ce qui réduit d'autant les probabilités d'interactions entre les populations par le biais des corridors d'habitat restants. Toutefois, étant donné le manque de données génétiques pour effectuer des comparaisons entre les populations, il a été décidé qu’il y avait une seule unité  désignable pour cette espèce.

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