Grand héron (sous-espèce fannini) (fannini subspecies) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 9

Taille et tendances des populations

Activités de recherche

Les relevés de Grands Hérons du Pacifique se sont concentrés sur les colonies de nidification. De nombreux documents publiés et non publiés ont été produits pour faire état de ces relevés (voir à titre d’exemple Norman et al., 1989; Butler et al., 1995; Butler, 1997; Vennesland, 2000; Vennesland et Butler, 2004).

L’historique des activités de recherche dans les colonies de nidification des Grands Hérons du Pacifique sur la côte de la Colombie-Britannique est long et varié. Les bases de données du Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique (http://www.env.gov.bc.ca/cdc/) contiennent des enregistrements de colonies de nidification remontant à 1920. Des sites de nidification ont été enregistrés dans l’ensemble de l’aire de répartition du Grand Héron du Pacifique, quoique les relevés se soient concentrés sur le centre de cette aire (le détroit de Georgie). Les relevés antérieurs à 1970 sont rares (la base de données du CDC renferme seulement 77 observations de colonies sur plus de 50 ans). Entre 1970 et le milieu des années 1980, les relevés se sont intensifiés avec la mise en œuvre de projets de recherche visant spécifiquement cette espèce (182 observations de colonies entre 1970 et 1986). Cependant, la cueillette de données durant cette période (voir par exemple Forbes et al., 1985a) s’est concentrée sur les tentatives de nidification réussies et ignorait généralement les échecs de nidification (une importante source de variation dans la productivité des nids; Butler et al., 1995; Vennesland, 2000; Gebauer et Moul, 2001). Certaines entrées dans la base de données comprennent des mesures de la productivité basées sur les réussites et les échecs de nidification, mais les échantillons sont de petite taille. Les relevés se sont encore intensifiés après 1986 (882 observations de colonies entre 1987 et 2005), et les relevés annuels ont suivi une méthodologie uniforme couvrant la majorité du bassin de Georgie la plupart des années durant cette période (les données de 2005 sont les dernières données recueillies et ont été consignées en octobre 2007). Les tendances démographiques absolues fondées sur le dénombrement des hérons dans les colonies de nidification sont toutefois difficiles à dégager en raison de l’accroissement général des activités de recherche durant cette période.

Des relevés de nature bénévole ont également été menés pendant de nombreuses années sur la côte de la Colombie-Britannique, notamment le Recensement des oiseaux de Noël (RON) hivernal, le relevé des oiseaux aquatiques des côtes hivernal et le Relevé des oiseaux nicheurs (BBS) estival. Les tendances qui se dégagent des données du RON doivent être toutefois interprétées avec discernement, en raison de l’accroissement de la participation à ce recensement et de la détectabilité des Grands Hérons. En effet, le nombre de bénévoles participant au Recensement des oiseaux de Noël a considérablement augmenté au cours des 20 dernières années dans les basses terres continentales de la Colombie-Britannique (D. Fraser, communication personnelle), mais comme les hérons sont faciles à détecter, cette augmentation des activités de recherche ne se traduit pas nécessairement par une augmentation du nombre d’individus détectés. Étant donné que la tendance est calculée selon le nombre d’individus détectés par observateur l’heure, la tendance peut être artificiellement biaisée à la baisse si le nombre d’observateurs l’heure augmente sans une augmentation correspondante de la probabilité de détecter des individus additionnels. Ainsi, la tendance au déclin pourrait être en partie attribuable à l’augmentation du nombre d’observateurs.

Les relevés des oiseaux aquatiques des côtes devraient être considérés comme les sources de données les plus fiables pour plusieurs raisons : les participants sont relativement bien formés, les sites de relevés sont identifiés géographiquement et parcourus plusieurs fois par année et les résultats sont analysés à l’aide de méthodes statistiques éprouvées (Badzinski et al., 2005). Cependant, les données du relevé des oiseaux aquatiques des côtes n’ont été analysées que pour une seule période de cinq ans (de 1999-2000 à 2003-2004), ce qui limite leur utilité par comparaison aux données du RON et du BBS, qui s’étalent sur de plus longues périodes.

Abondance

La taille de la population de Grands Hérons du Pacifique est difficile à estimer, car les colonies ne sont pas stables et elles sont difficiles à dénombrer de manière standardisée; la plupart des régions côtières, en particulier à l’extérieur du détroit de Georgie, n’ont pas fait l’objet d’un relevé systématique (Butler, 1997; Vennesland, 2000; Gebauer et Moul, 2001).

Les régions pour lesquelles on dispose du moins d’information sur le Grand Héron du Pacifique sont celles à l’extérieur du détroit de Georgie, où peu de projets de recherche ont été entrepris. La première colonie signalée sur la côte ouest de l’île de Vancouver était une colonie de neuf couples découverte à proximité de Tahsis en 1989. Depuis, entre un et trois nids de hérons ont été observés à proximité de Bamfield sur la côte ouest de l’île de Vancouver, à Rose Harbour et sur les îles Ramsay et Murchison dans l’archipel de la Reine-Charlotte (P. Clarkson et B. Johnston, communication personnelle). Campbell et al. (1990) ont signalé un petit nombre de hérons nichant près de Prince Rupert. Malgré leur faible abondance, des hérons sont aperçus, généralement seuls, sur la plupart du littoral, se nourrissant dans des lits de varech, sur des quais ou en eau peu profonde. Depuis 1990, la plupart de la côte est parcourue durant la saison de nidification par l’un des rédacteurs (RWB). Aucune concentration de hérons n’a été relevée et des adultes seuls étaient dispersés. Une recherche intensive menée par des sous-traitants travaillant pour Parcs Canada a permis de relever quelques individus et trois nids dans la réserve de parc national Gwaii Haanas en 2006 (P. Dyment, communication personnelle). Dans le cadre de ce projet, on a cherché des hérons sur 1 180 km du littoral de l’île Graham et dans la partie nord de l’île Moresby; 19 hérons adultes et 6 hérons juvéniles ont été observés. Si l’on présume que les 19 adultes étaient en couple et que leur compagnon se trouvait dans le nid, alors le nombre d’adultes serait de 38 et le nombre total de hérons serait de 44. En présumant une densité semblable sur l’ensemble des 4 660 km de littoral de ces îles, on y compterait alors environ 174 individus. Engelstoft et Sopuck (2005) ont effectué le relevé de 500 km du littoral du parc Gwaii Haanas durant la saison de nidification et ont dénombré huit hérons. Si l’on postule également que ceux-ci représentaient un membre d’un couple nicheur, on compterait alors 16 hérons (0,032 individu/km). Les deux relevés ont permis de calculer des densités semblables (0,037 et 0,032). Il n’existe aucune estimation pour les autres sections de la côte, mais nos observations le long de la majorité de la côte nord et centrale indiquent une faible densité. Les 25 000 kilomètres environ de littoral à l’extérieur du détroit de Georgie pourraient accueillir environ 875 hérons, à une densité égale à celle des îles de la Reine-Charlotte, mais il est impossible de connaître la précision de cette estimation. Celle-ci est probablement libérale puisque certaines zones du territoire ne conviennent peut-être pas à l’espèce. Aucun nid n’a été observé dans la Réserve de parc national Pacific Rim, mais un maximum de six individus a été observé dans la baie Grice lors de relevés menés à l’été 2007. Certains de ces individus s’envolaient vers l’intérieur entre des épisodes de recherche de nourriture, ce qui laisse entendre qu’ils nichaient à proximité (Vennesland, données inédites). Bien que les hérons y soient rares durant la période de nidification, jusqu’à 100 individus fréquentent les vasières à proximité de Tofino en août et en septembre après la saison de nidification (P. Clarkson, communication personnelle).

La dernière estimation publiée de la taille de la population de Grands Hérons du Pacifique en Colombie-Britannique fait état d’environ 3 600 adultes nicheurs, dont 3 300 occuperaient le détroit de Georgie et 300 se trouveraient ailleurs sur la côte (Gebauer et Moul, 2001, d’après les données de Butler, 1997). D’après les données de 2005 pour le bassin de Georgie (estimation de 1 833 nids actifs dans 46 colonies), les relevés récents dans les îles de la Reine-Charlotte (environ 200 hérons, P. Dyment, communication personnelle) et notre estimation de 900 individus à l’extérieur du détroit de Georgie sur la côte continentale, nous considérons que la meilleure estimation de la taille de la population serait d’environ 4 000 à 5 000 adultes nicheurs au Canada.

Les relevés de Grands Hérons du Pacifique dans l’État voisin de Washington n’ont pas été aussi exhaustifs que ceux de la Colombie-Britannique, mais de récentes tentatives de relevés de hérons à cet endroit ont permis d’estimer une population d’environ 5 500 adultes nicheurs (Eissinger, 2007). Aucune information n’est disponible en ce qui concerne l’Alaska, quoique les populations y sont probablement de petite taille, comme sur la côte nord de la Colombie-Britannique. Au total, la population mondiale de Grands Hérons du Pacifique compte probablement entre 9 500 et 11 000 adultes nicheurs.

Fluctuations et tendances

Les tendances démographiques des Grands Hérons du Pacifique présentées dans ce rapport de situation ont été déterminées à l’aide des données de relevés dans les colonies de nidification (Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique, 2007), du Recensement des oiseaux de Noël (RON), du relevé des oiseaux aquatiques des côtes, du Relevé des oiseaux nicheurs (BBS) et de modélisations démographiques. Les résultats sont variables. Certaines séries de données indiquent un déclin (productivité des nids mesurée d’après les relevés des colonies, RON et modélisations démographiques), d’autres indiquent une apparente stabilité (dénombrements des nids selon les relevés des colonies et le BBS), tandis qu’une série indique une hausse (relevé des oiseaux aquatiques des côtes). Ces variations sont discutées ci-dessous.

Relevés des colonies – tendances tirées des données sur la taille des colonies 

Le dénombrement des couples dans les colonies donne un aperçu biaisé des tendances, car les activités de recherche n’ont pas été constantes avec le temps (elles ont généralement augmenté) et les hérons se déplacent entre les régions et les colonies d’une année à l’autre (Simpson et al., 1987). Cependant, si de nombreuses colonies sont analysées, la tendance générale de l’abondance donnerait un aperçu des déplacements entre les colonies et des variations d’abondance à petite échelle. La méthode consiste à faire la somme de l’augmentation ou de la diminution des effectifs annuels dans toutes les colonies (c.-à-d. Σ[colonie X année 2 - colonie X année 1; colonie Y année 2 - colonie Y année 1; etc.] pour toutes les colonies).


Figure 4. Sommes des augmentations et des diminutions annuelles du nombre de couples nicheurs se trouvant dans des colonies de Grands Hérons du Pacifique dans la côte sud de la Colombie-Britannique entre 1986 et 2005.

Sommes des augmentations et des diminutions annuelles (voir description longue ci-dessous).

Le nombre de colonies échantillonnées chaque année est indiqué entre parenthèses (Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique, 2007).

Description pour la figure 4

La somme des augmentations et des diminutions du nombre de couples nicheurs dans les colonies entre 1986 et 2005 indique que le nombre de couples nicheurs quittant les colonies ou s’y installant d’une année à l’autre semble être demeuré relativement stable durant cette période. Cette méthode comporte toutefois un biais, car les échantillons ne proviennent que de colonies ayant été observées à de multiples reprises pendant des années consécutives. Ainsi, cette méthode offre un aperçu d’un échantillon relativement petit de colonies stables et observées régulièrement, qui pourrait ne pas représenter des tendances réelles de l’occupation des colonies. Néanmoins, cette analyse permettrait de faire ressortir tout changement dramatique dans la population nicheuse.

Le total général négatif de 1997 (-569) est principalement attribuable à un déclin prononcé dans les deux plus grandes colonies du détroit de Georgie (Point Roberts et parc Pacific Spirit). Les deux colonies se sont repeuplées pendant les années subséquentes, mais le parc Pacific Spirit a été complètement abandonné en 2004. Point Roberts a été abandonné complètement en 2003, et un nouvel emplacement a été colonisé en 2004; cet événement est illustré par le total général négatif de 2003 et le total général positif de 2004, année où ces individus ont colonisé le nouvel emplacement.


Relevés des colonies – tendances tirées du succès de la nidification et de la productivité

Tel que mentionné précédemment, l’augmentation marquée des activités de recherche avec le temps représente un défi particulier pour l’analyse de ce type de données. Il faut donc garder en mémoire que certaines analyses sont de nature isolée et que les périodes de temps varient.

Le succès de la nidification des hérons (soit la proportion de couples nicheurs parvenant à élever au moins un petit jusqu’à l’envol) sur la côte de la Colombie-Britannique est à l’heure actuelle largement inférieur à ce qu’il était auparavant.Forbes et al. (1985a) ont estimé qu’environ 92 p. 100 des couples nicheurs avaient réussi la nidification entre 1977 et 1981, et une recherche documentaire de Forbes et al. (1985a) pour la même période concluait un taux de succès de 80 p. 100 à l’échelle du continent. Vennesland (2000) a estimé que moins de la moitié des tentatives de nidification avaient réussi en 1998 et en 1999, et cette tendance a également été relevée pour des années subséquentes (Vennesland, 2003; McClaren, 2005; Chatwin et al., 2006).

La productivité moyenne des nids (oisillons à l’envol par tentative de nidification active) sur la côte de la Colombie-Britannique au cours des dernières années a été la plus basse parmi toutes les populations étudiées en Amérique du Nord (Vennesland et Butler, 2004). De 1971 à 1986, la productivité moyenne des nids était de 1,7 oisillon à l’envol par tentative de nidification active et de 2,55 oisillons à l’envol par tentative de nidification réussie (R. Vennesland, données inédites). Ces données sont généralement représentatives de la productivité en Amérique du Nord pour cette période (Vennesland, 2000). Les données signalées de productivité dans côte sud de la Colombie-Britannique au cours des dernières années sont de 0,82 oisillon à l’envol par tentative de nidification active et de 1,98 oisillon à l’envol par tentative de nidification réussie en 1999 (Vennesland et Butler, 2004), de 0,82 oisillon à l’envol par tentative de nidification active et de 1,84 oisillon à l’envol par tentative de nidification réussie en 2002 (Vennesland, 2003) et de 1,3 oisillon à l’envol par tentative de nidification active et de 1,7 oisillon à l’envol par tentative de nidification réussie en 2004 (McClaren, 2005). La productivité des nids a donc presque diminué de moitié par rapport aux niveaux historiques (figure 5).


Figure 5. Productivité moyenne de toutes les tentatives de nidification actives dans les colonies de Grands Hérons du Pacifique de la côte sud de la Colombie-Britannique entre 1971 et 2005.

Productivité moyenne de toutes les tentatives de nidification actives (voir description longue ci-dessous).

La productivité par tentative de nidification active est le nombre moyen d’oisillons à l’envol produits découlant de ces tentatives. La taille des échantillons des observations de colonies pour chaque période est indiquée entre parenthèses. Aucune observation n’était disponible pour 1996. Les plages d’erreur correspondent à un écart-type de la moyenne (Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique, 2007).

Description pour la figure 5

La figure 5 illustre le sommaire des tendances de la productivité de nidification par tentative de nidification active entre 1971 et 2005. Avant 1987, la plupart des études ignoraient les échecs de nidification et ne retenaient que le nombre d’oisillons à l’envol des tentatives de nidification réussies. Comme de nombreuses études l’ont démontré au cours des dernières années, les échecs de nidification influent de façon importante sur le taux de productivité global de nidification (voir par exemple Butler et al., 1995; Vennesland et Butler, 2004). À cause de cette omission, peu de données antérieures à 1987 peuvent être analysées. Par conséquent, notre analyse regroupe les observations de colonies sur trois périodes : de 1971 à 1986 (activité de recherche annuelle relativement faible, 19 observations au total), de 1987 à 1995 (activité de recherche accrue, 125 observations au total) et de 1997 à 2005 (activité de recherche maximale, 251 observations au total). Une année (1996) a été exclue, car aucune donnée sur la productivité n’a été recueillie. Les données indiquent que la productivité de nidification a diminué considérablement au cours de ces trois périodes.

 


Figure 6. Productivité moyenne annuelle des nids pour toutes les tentatives de nidification réussies dans des colonies de Grands Hérons du Pacifique sur la côte sud de la Colombie-Britannique entre 1977 et 2005.

Productivité moyenne annuelle des nids pour toutes les tentatives de nidification réussies (voir description longue ci-dessous).

La productivité par tentative de nidification réussie est le nombre moyen d’oisillons à l’envol produits dans tous les nids ayant produit au moins un oisillon jusqu’à l’envol. Les données de 1982 à 1987, 1994 à 1996 et de 2000 ont été exclues, car elles comptaient moins de cinq échantillons. Le nombre de colonies analysées chaque année est indiqué entre parenthèses. Les plages d’erreur correspondent à un écart-type par rapport à la moyenne (Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique, 2007).

Description pour la figure 6

La figure 6 illustre les tendances de la productivité de nidification par tentative de nidification réussie entre 1977 et 2005. Comme cette série de données a été recueillie de manière plus uniforme que les données sur la productivité par tentative de nidification active, il a été possible d’analyser les observations annuelles de colonies. Cependant, pour des raisons de clarté, les données sont regroupées par année. L’analyse est fondée sur un modèle linéaire général de Poisson (Agresti, 2002), avec facteur de correction pour la surdispersion, conséquence probable de l’échantillonnage répété de certaines colonies avec le temps (Agresti, 1996). La productivité des nids par tentative de nidification réussie a diminué considérablement pendant cette période.


Relevés des colonies – tendances dans les effets de la taille des colonies

Une étude de 1999 a démontré que la productivité des nids par tentative de nidification active augmentait significativement en fonction de la taille des colonies, probablement en raison du taux d’échec plus élevé des tentatives de nidification dans les plus petites colonies, mais aucune relation n’a été établie entre la productivité par tentative de nidification réussie et la taille des colonies (Vennesland et Butler, 2004). La présente section se penche sur la relation entre la taille des colonies et la productivité avec le temps. Les données ont été regroupées en catégories déterminées par la taille des colonies, et les observations à l’échelle des colonies ont été analysées à l’aide d’un modèle linéaire logistique général (Agresti, 2002), avec facteur de correction pour la surdispersion, conséquence probable de l’échantillonnage répété de certaines colonies avec le temps (Agresti, 1996).

Entre 1987 et 2001, la productivité par tentative de nidification active augmente significativement en fonction de la taille des colonies (figure 7). De 1977 à 2005, la productivité par tentative de nidification réussie diminue significativement en fonction de la taille des colonies (figure 8). Les hérons dans les grandes colonies ont donc connu un meilleur succès de nidification dans l’ensemble (en raison d’un taux inférieur d’échec de la nidification). Cependant, si l’on fait abstraction des échecs de la nidification (c.-à-d. les nichées réussies), les hérons des grandes colonies élèvent moins de petits par tentative de nidification que les hérons dans des colonies de plus petite taille.


Figure 7. Productivité moyenne par tentative de nidification active en fonction de la taille des colonies de Grands Hérons du Pacifique sur la côte sud de la Colombie-Britannique entre 1987 et 2001.

Productivité moyenne par tentative de nidification active.

La productivité par tentative de nidification active est le nombre moyen d’oisillons à l’envol produits dans toutes les tentatives de nidification. Les données de 1994 et 1995 ont été exclues, car la taille des échantillons était inférieure à cinq. Les plages d’erreur correspondent à un écart-type par rapport à la moyenne (Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique, 2007).

 


Figure 8. Productivité moyenne par tentative de nidification réussie en fonction de la taille des colonies de Grands Hérons du Pacifique sur la côte sud de la Colombie-Britannique entre 1977 et 2001.

Productivité moyenne par tentative de nidification réussie.

La productivité par tentative de nidification réussie est le nombre moyen d’oisillons à l’envol produits dans tous les nids ayant produit au moins un oisillon à l’envol. Les données de 1982 à 1987, de 1994 à 1996 et de 2000 ont été exclues, car la taille des échantillons était inférieure à cinq. Les plages d’erreur correspondent à un écart-type par rapport à la moyenne (Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique, 2007).


La productivité relativement élevée par tentative de nidification active dans les grandes colonies (figure 7) signifie que les échecs de nidification sont relativement négligeables dans ces colonies (Vennesland et Butler, 2004). Cependant, des études antérieures ont permis de constater que le taux élevé d’échec de la nidification sur la côte de la Colombie-Britannique représentait un facteur important à l’origine des faibles taux de productivité des nids (Gebauer et Moul, 2001; Vennesland et Butler, 2004). Information plus importante encore, les données indiquent que la perte du nombre de hérons juvéniles dans les tentatives de nidification réussies constitue un autre facteur à l’origine des faibles taux de productivité observés dans le détroit de Georgie (comme en témoigne le déclin important illustré à la figure 6). Ce phénomène est particulièrement préoccupant dans les grandes colonies, celles-ci ayant une moindre productivité par tentative de nidification réussie que les petites colonies (figure 8).

La plupart des couples nicheurs se reproduisent dans de grandes colonies situées dans une petite partie de l’aire de répartition de la sous-espèce (c.-à-d. le bas détroit de Georgie). En 2005, 68 p. 100 des 1 833 couples nicheurs (n = 46 colonies) étaient concentrés en 6 colonies de plus de 100 couples nicheurs. Quatre de ces six colonies se trouvaient dans la vallée du bas Fraser, tandis que les deux autres se situaient dans le sud de l’île de Vancouver et le sud des îles Gulf.

Butler et Vennesland (2000) émettent l’hypothèse que les hérons quitteraient les grandes colonies à cause de l’intensification des perturbations et se disperseraient davantage lors de la nidification, à la recherche de sites relativement libres de perturbations par les aigles et les humains. Cependant, une tendance opposée a été récemment relevée dans l’État de Washington. Eissinger et al. (2007) ont démontré que la proportion de couples nicheurs vivant dans des petites colonies est en baisse alors que le nombre de grandes colonies est en hausse, peut-être pour amenuiser le risque de prédation. Si cette tendance prévaut également au Canada et si la productivité continue à diminuer, les hérons pourraient soit connaître des taux élevés d’échec de la nidification dans les petites colonies ou soit produire un faible nombre d’oisillons à l’envol dans les grandes colonies.


Relevés des colonies – superficie efficace de l’aire de répartition

Bien que la productivité des Grands Hérons du Pacifique ait connu un déclin important (autant au niveau des tentatives de nidification actives que des tentatives de nidification réussies) depuis les années 1970, l’occupation des colonies semble généralement stable (figure 4). Certains déplacements de population et problèmes graves de productivité des nids ont été observés le long du détroit de Georgie. Le nombre de hérons nicheurs observés sur la Sunshine Coast a chuté de 97 en 1978 (Forbes et al., 1985b) à 4 en 2004 (la dernière année d’enregistrement pour cette région). Environ 90 couples de hérons ont niché à Pender Harbour et 6 petites colonies se trouvaient le long de la Sunshine Coast durant les années 1970 (Simpson, 1984). Quelques colonies y étaient encore présentes pendant les années 1990 (Butler, 1997), mais dernièrement seuls quelques hérons nicheurs y ont été observés (Vennesland, 2000). Les derniers relevés du nord-est de l’île de Vancouver sont également troublants. Chatwin et al. (2006) signalent qu’aucune colonie au nord de la baie Nanoose n’est parvenue à élever un seul petit en 2005. On ignore l’importance des répercussions des déplacements de populations sur la Sunshine Coast et de l’absence de productivité dans le nord de l’île de Vancouver en 2005 sur la population générale de Grands Hérons du Pacifique.

Bien que le Grand Héron du Pacifique vive le long du littoral, la majorité des individus nichent dans le sud du détroit de Georgie et le nord de Puget Sound, là où les menaces de l’humain et du Pygargue à tête blanche se font le plus sentir. Cette région est également la seule où une reproduction réussie d’une quelconque importance a lieu.

Tendances tirées des relevés de population à participation volontaire

Recensement des oiseaux de Noël

Gebauer et Moul (2001) concluent que les données des relevés du RON révèlent un déclin modeste (vallée du bas Fraser) ou rapide (Sunshine Coast) des populations. Nous avons mené l’analyse de toutes les données des cercles de dénombrement du RON situés sur la côte (c.-à-d. les emplacements occupés par des Grands Hérons du Pacifique). Nous avons limité cette analyse aux trois dernières générations, en accord avec les critères d’inscription du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC). Pour calculer la durée d’une génération (définie ici comme l’âge moyen des individus reproducteurs), un modèle à matrice de population (d’après Caswell, 2001) a été utilisé (M. Drever, données inédites), en présumant des taux de survie pour trois cycles vital (taux de survie du premier hiver de 0,273, taux de survie à la deuxième année de 0,5 et taux de survie des adultes de 0,727; Butler, 1995), une productivité annuelle de nidification de 1,12 oisillon à l’envol par tentative de nidification active (R. Vennesland, données inédites pour la période de 1986 à 2005) et une espérance de vie maximum à l’état sauvage de 24 ans (Butler, 1992). L’âge moyen des Grands Hérons du Pacifique reproducteurs en Colombie-Britannique ainsi calculé est de 5,6 ans. À l’aide de cet âge moyen, nous avons analysé les données des relevés du RON sur deux périodes : de 1991-1992 à 2006-2007 (en présumant une durée de génération de cinq ans) et de 1988-1989 à 2006-2007 (en présumant une durée de génération de six ans).


Figure 9. Analyse des données du Recensement des oiseaux de Noël (RON) pour trois générations de Grands Hérons du Pacifique au Canada.

Analyse des données du Recensement des oiseaux de Noël (voir description longue ci-dessous).
Description pour la figure 9

Les données présentées s’étalent de l’hiver 1988-1989 (1988 sur la figure) à l’hiver 2006-2007 (2006 sur la figure). La durée d’une génération de l’espèce a été calculée à 5,6 ans, et les régressions linéaires sont indiquées pour une durée de génération de cinq ans (période de 16 ans, ligne pointillée) et une durée de génération de six ans (période de 19 ans, ligne pleine). Les équations des régressions linéaires sont indiquées. Les points du graphique encerclés correspondent aux années également couvertes par le relevé des oiseaux aquatiques des côtes (Badzinski et al., 2005).

Depuis 1991-1992, le nombre moyen de hérons observés par observateur l’heure en fonction du temps a connu un déclin significatif de 19 p. 100 (t = -2,18; P < 0,05; n = 16; r2 = 0,20). Depuis 1988-1989, le nombre moyen de hérons observés par observateur l’heure en fonction du temps a connu un déclin significatif de 26 p. 100 (t = -3,18; P < 0,01; n = 19; r2 = 0,34). Tel que mentionné précédemment, ces résultats doivent être interprétés avec discernement en raison du biais introduit par l’intensification des activités de recherche d’une espèce d’oiseau facilement détectable (voir la section Activités de recherche).


À l’aide des données du RON couvrant toute la côte sud de la Colombie-Britannique (en présumant une durée de génération de cinq ans, estimation conservatrice compte tenu de notre calcul d’un âge moyen de 5,6 ans pour les adultes reproducteurs), nous avons relevé une augmentation quasi significative du nombre moyen de hérons observés par observateur l’heure dans la vallée du bas Fraser (t = 1,98; P = 0,07; n = 16; r2 = 0,16), un déclin significatif du nombre moyen de hérons observés par observateur l’heure dans l’île de Vancouver (t = -2,36; P < 0,05; n = 16; r2 = 0,23) et un déclin significatif du nombre moyen de hérons observés par observateur l’heure dans la Sunshine Coast (t = -4,08; P < 0,01; n = 16; r2 = 0,51). Ces conclusions corroborent celles d’autres analyses de données de relevé (voir les sections précédentes) et nos analyses démographiques (voir ci-dessous), c’est-à-dire que la vallée du bas Fraser est la seule région de Colombie-Britannique où une reproduction efficace a lieu et qu’une contraction de l’aire de répartition serait en cours dans la portion nord du détroit de Georgie.


Relevé des oiseaux aquatiques des côtes

Les données du relevé des oiseaux aquatiques des côtes indiquent une augmentation significative du nombre de Grands Hérons du Pacifique en hiver sur la côte de la Colombie-Britannique de 1999-2000 à 2003-2004 (augmentation de 6,9 p. 100 par année; P < 0,05; Badzinski et al., 2005). La méthodologie de ces relevés est généralement plus fiable que celle du RON et du BBS. Le relevé des oiseaux aquatiques des côtes et le RON étant tous deux menés en hiver, les résultats de ces relevés, tels que rapportés ici, semblent contradictoires. Cependant, la tendance à la hausse des données du relevé des oiseaux aquatiques des côtes correspond à une période de cinq ans, alors que les données du RON ont été analysées sur une période beaucoup plus longue. La période où les données du relevé des oiseaux aquatiques des côtes sont analysées correspond à une période d’augmentation des observations dans les données du RON (bien que non significative; t = 1,69; P = 0,19; n = 5; r2 = 0,32; figure 9). Cela suggère que l’intervalle de temps de l’analyse des données du relevé des oiseaux aquatiques des côtes pourrait être trop court pour refléter avec précision les tendances à long terme.


Relevé des oiseaux nicheurs

Les données du Breeding Bird Survey (BBS) indiquent un déclin significatif de 5,7 p. 100 des hérons sur la côte de la Colombie-Britannique entre 1966 et 1994 (Downes et Collins, 1996). Cependant, l’analyse approfondie des données du BBS semble révéler que l’un des parcours de relevé faisait sombrer l’analyse, et que son retrait éliminait toute tendance significative à la baisse de la population (B. Smith, données inédites).

Sommaire des tendances dans la productivité de nidification et la situation démographique

Les dénombrements découlant de relevés de colonies indiquent des niveaux relativement stables d’occupation des colonies, mais ces relevés sont peu utiles pour déterminer la situation démographique. Les indicateurs de productivité de nidification montrent des déclins significatifs, le nombre d’oisillons à l’envol produits par nid actif ayant presque diminué de moitié depuis les années 1970. La diminution de la productivité par tentative de nidification réussie pourrait affecter les grandes colonies de manière disproportionnée dans une région circonscrite (d’une superficie d’environ 5 000 km2), où la plupart des individus de la sous-espèce se reproduisent. Une contraction de l’aire de répartition pourrait être en cours dans la Sunshine Coast, et la productivité est inexistante dans le nord de l’île de Vancouver au moins une année.

Les données du Recensement des oiseaux de Noël indiquent un déclin significatif de 19 à 26 p. 100 sur trois générations, les données du relevé des oiseaux aquatiques des côtes indiquent une croissance significative, mais ce relevé ne couvre qu’une période de cinq ans, et les données du Relevé des oiseaux nicheurs indiquent des tendances neutres.

Tendances des analyses démographiques

Le modèle démographique des Grands Hérons du Pacifique suppose un taux de survie du premier hiver de 0,273, un taux de survie à la deuxième année de 0,5 et un taux de survie subséquent de 0,727 (Butler, 1995). Nous avons commencé la modélisation avec 1 000 femelles nicheuses et le taux annuel moyen de succès de la nidification mesuré dans des colonies de l’île de Vancouver et de la vallée du bas Fraser entre 1988 et 2003. La productivité des nids était plus élevée de manière significative dans la vallée du bas Fraser par rapport à l’île de Vancouver (figure 10; F = 15,3, df = 1, P < 0,01), ce qui corrobore des analyses antérieures (Vennesland, 2000; Vennesland, 2003; McClaren, 2005, Chatwin et al., 2006).

Pour conserver leurs effectifs, les hérons doivent parvenir à élever des petits avec succès dans environ 63 p. 100 des tentatives de nidification. Sur l’île de Vancouver, le taux moyen de succès de la nidification n’a jamais atteint ce seuil minimum, tandis que les colonies de la vallée du bas Fraser ont dépassé ce seuil cinq des sept années où des données sont répertoriées. Selon cette analyse, la vallée du bas Fraser est une source de recrutement pour l’île de Vancouver. Selon cette même analyse, la vallée du bas Fraser produit environ 66 hérons juvéniles pour 1 000 femelles, tandis que les colonies de l’île de Vancouver sont en pénurie de 230 hérons juvéniles pour 1 000 femelles. En conjonction avec notre analyse des données du RON (voir les sections précédentes), ces résultats préliminaires suggèrent qu’au cours des trois dernières générations, la vallée du bas Fraser n’est pas parvenue à compenser la pénurie de production de hérons juvéniles sur l’île de Vancouver (seule la vallée du bas Fraser a des indicateurs démographiques positifs).

La vallée du bas Fraser étant la seule source de recrutement, il devient primordial de conserver la productivité de cette région relativement petite (la vallée du bas Fraser a une superficie d’environ 5 000 km2 seulement). Cela suggère également que le Grand Héron du Pacifique est le plus vulnérable dans la région la plus peuplée, soit la vallée du bas Fraser. Bien que l’aire de répartition du Grand Héron du Pacifique soit relativement étendue, la superficie de l’aire de répartition efficace pourrait être restreinte à une région de la province de petite taille et fortement peuplée (c.-à-d. la vallée du bas Fraser).


Figure 10. Productivité moyenne par tentative de nidification active chez les Grands Hérons du Pacifique de la côte sud de la Colombie-Britannique, entre 1992 et 2003, et comparaison des données continentales de l’île de Vancouver et de la vallée du bas Fraser (années postérieures à 1987 où plus de cinq observations de colonies pour chaque région ont été effectuées).

Productivité moyenne par tentative de nidification active.

La productivité par tentative de nidification active est le nombre moyen d’oisillons à l’envol produits dans toutes les tentatives de nidification (Conservation Data Centre de la Colombie-Britannique, 2007).

Immigration de source externe

L’immigration en provenance du sud (de l’État de Washington) est théoriquement élevée en raison de la nature contiguë de Puget Sound et du détroit de Georgie et de la présence de populations de taille semblable dans les deux régions. Cependant, les menaces pesant sur les populations et l’habitat des hérons aux États-Unis sont semblables à celles que l’on connaît au Canada, voire plus intenses en raison de la plus grande population humaine qui y vit (Georgia Basin Ecosystem Initiative, 2002).

On ne dispose d’aucun relevé détaillé sur la productivité de nidification dans les colonies ou les tendances démographiques dans l’État de Washington. Cependant, les données du RON provenant de cercles de dénombrement à proximité de la frontière canado-américaine (situés à environ 100 km du détroit de Georgie ou du détroit Juan de Fuca) indiquent un déclin significatif de la population de 34 p. 100 (t = -3,02; P < 0,01; n = 16; r2 = 0,35) au cours des 15 dernières années ou 3 générations (en supposant une durée de génération de 5 ans). Ainsi, les populations de Grands Hérons du Pacifique dans l’État de Washington à proximité du Canada semblent subir un taux de déclin plus élevé que les populations canadiennes et, de ce fait, sont peu enclines à produire une immigration significative.

L’immigration venant du nord est probablement faible en raison de la petite taille des populations de hérons qui y vivent. En outre, la productivité des régions septentrionales est inconnue.

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