Hespérie persius de l'est : évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 10

Facteurs limitatifs et menaces

Le principal facteur qui limite la taille et la répartition des populations de l’E. p. persius est la qualité et la répartition des habitats de reproduction. Cette hespérie se rencontre presque toujours dans des habitats de savane et de prairie, en association avec le lupin vivace et la baptisie des teinturiers, beaucoup plus rarement dans d’autres habitats. Bien que des perturbations (naturelles ou provoquées intentionnellement dans le cadre d’une stratégie de gestion) soient nécessaires pour assurer le maintien des communautés des boisés ouverts et des prairies, les grands incendies de forte intensité peuvent entraîner la destruction de toutes les populations de l’hespérie dans une région donnée. La suppression des incendies et la plantation d’arbres ont certainement eu des conséquences dévastatrices pour l’E. p. persius en favorisant la transformation liée à la succession végétale de son habitat et, de ce fait, le déclin des populations naturelles de lupin. L’isolement accru des colonies de lupin causé par des interventions humaines ou des processus naturels (p. ex. succession forestière, création d’obstacles à la dispersion causée par le développement industriel ou urbain) a probablement eu aussi des effets néfastes pour l’E. p. persius.

L’extrême abondance du cerf de Virginie et les dommages dus à l’herbivorie qui en découlent sont également perçus comme une des causes du déclin des populations des plantes hôtes. La spécificité à l’égard de plantes hôtes qui sont elles-mêmes rares et réparties en populations isolées et fragmentées constitue une contrainte importante pour l’hespérie Persius de l’Est.

Parmi les facteurs naturels qui peuvent influer sur la survie individuelle, mentionnons les parasitoïdes et les prédateurs (aucun n’est cependant reconnu comme spécifique à l’E. p. persius) et divers facteurs indépendants de la densité, comme les incendies, la dessiccation, les conditions météorologiques et même la consommation accidentelle par le cerf de Virginie. En raison de la nature dynamique de l’habitat privilégié par cette hespérie, il y a tout lieu de croire que la survie individuelle est faible et varie au rythme de l’évolution naturelle de l’habitat et des perturbations induites par le feu. Dans le passé, la survie des populations était assurée par la dispersion d’individus vers d’autres régions renfermant des habitats adéquats. La disparition de ces refuges a fortement compromis les chances des individus qui cherchent à échapper à des conditions hostiles de trouver ailleurs des endroits propices à leur reproduction.

Les facteurs anthropiques compromettant la survie de l’hespérie incluent les applications d’insecticides et divers facteurs indirects influant sur son habitat, dont la suppression des incendies, l’établissement de conditions favorisant la croissance des populations du cerf de Virginie et la colonisation par les plantes envahissantes. Les traitements insecticides dirigés contre la spongieuse (Lymantria dispar [L.]) ont été incriminés dans l’effondrement des populations de l’E. p. persius au cours des années 1950, et les programmes courants de pulvérisation pourraient entraîner l’élimination des dernières populations existantes qui pourraient se trouver dans les territoires traités (NatureServe Explorer, 2001). À St. Williams, les effets combinés de la sécheresse de 1988 et des pulvérisations de Bacillus thuringiensis (Bt) pourraient avoir provoqué la disparition d’une population qui devait déjà être très petite à l’époque, à supposer qu’elle existait encore à ce moment-là (Peter Carson, comm. pers., 2002). Indirectement, les humains ont également participé à l’altération de l’habitat de l’hespérie en éliminant les incendies et en permettant ainsi à la végétation ligneuse de prospérer au point d’inhiber la croissance et la survie des plantes hôtes. L’élimination des prédateurs naturels du cerf de Virginie dans le sud-ouest de l’Ontario et l’altération de la structure du paysage ont permis aux populations de cet herbivore d’augmenter considérablement et, dès lors, d’exercer des pressions intenses sur le lupin et d’autres herbacées dans les habitats de prairie et de savane du sud de l’Ontario.

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