Mûrier rouge (Morus rubra) programme de rétablissement : annexe A

Annexe A : Effets sur l'environnement et d'autres espèces

Conformément à la Directive du Cabinet sur l'évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes (gouvernement du Canada, 2004), une évaluation environnementale stratégique (EES) est réalisée pour tous les programmes de rétablissement d'espèces en péril. L'EES a pour objet d'intégrer les considérations environnementales à l'élaboration de projets de politiques, de plans et de programmes publics afin d'appuyer une prise de décisions respectueuse de l'environnement.

La planification du rétablissement se veut à la fois bénéfique pour l'espèce en péril et la biodiversité en général. On reconnaît toutefois que, outre les avantages attendus, certains programmes peuvent avoir des conséquences imprévues sur l'environnement. Le processus de planification, fondé sur les lignes directrices nationales, prend directement en considération tous les effets sur l'environnement, en particulier les effets possibles sur les espèces ou les habitats qui ne sont pas visés. Les résultats de l'EES sont pris en compte dans le programme de rétablissement proprement dit, mais sont également résumés ci-dessous dans le présent énoncé.

La plupart des grandes stratégies proposées dans le présent programme de rétablissement auront des effets positifs sur d'autres espèces qui occupent la forêt carolinienne, et sur les forêts elles mêmes. De nombreuses populations de mûrier rouge se trouvent à des endroits où vivent également d'autres espèces en péril (p. ex. le frêne bleu [Fraxinus quadrangulata] et le noyer cendré [Juglans cinerea]). La fragmentation est l'une des principales menaces dans les boisés caroliniens. Les efforts faits pour protéger l'habitat, accroître la connectivité entre les différentes parcelles d'habitat et maintenir et restaurer l'intégrité écologique dans la zone biologique carolinienne profiteront inévitablement aux espèces en péril, de même qu'à de nombreuses espèces qui partagent fréquemment l'habitat du mûrier rouge. Lorsque des mûriers blancs ou des mûriers hybrides seront enlevés ou qu'il y aura coupe des branches à proximité de mûriers fortement ombragés, ces activités ouvriront le couvert forestier, ce qui accroîtra la pénétration de la lumière et profitera à des espèces indigènes qui tolèrent mal l'ombre, par exemple le frêne bleu. Il faudra surveiller et gérer soigneusement ces activités pour éviter la pousse d'autres espèces introduites/envahissantes à ces endroits. Les efforts faits pour réduire le nombre d'espèces envahissantes auront des effets positifs sur d'autres espèces indigènes qui se font concurrence pour l'utilisation de l'espace et des ressources. L'accroissement de la population de mûrier rouge par un meilleur recrutement des semis offrira une source d'alimentation aux oiseaux, et dans une moindre mesure, aux petits et moyens mammifères qui se nourrissent des fruits et les dispersent ensuite.

Certaines des stratégies pourraient toutefois avoir des effets néfastes sur d'autres espèces qui occupent la forêt carolinienne. L'utilisation d'herbicides pour éviter que les mûriers blancs ou les mûriers hybrides ne germent de nouveau pourrait avoir des répercussions sur le sol, la qualité des eaux souterraines et de surface et pourrait endommager la végétation voisine si les herbicides ne sont pas soigneusement appliqués. Pour limiter ces effets, les herbicides devraient être appliqués directement par des injections dans les troncs ou par une peinture ou un méchage des troncs coupés ou ceinturés. L'application d'herbicides sur les terres de Parcs Canada devra se faire conformément à la directive 2.4.1 sur la lutte antiparasitaire intégrée (Parcs Canada, 1998).

Lorsqu'il y aura coupe de mûriers blancs ou de mûriers hybrides, on prendra grand soin de la végétation et de la faune vulnérable du voisinage pour s'assurer que les autres espèces, communautés et processus écologiques subissent le moins de dommages possible. L'enlèvement des mûriers blancs et/ou des mûriers hybrides de grande taille pourrait nuire à la nidification, endommager des nids ou blesser des oiseaux rares ou migrateurs, de petits mammifères (dont le petit polatouche) et d'autres espèces sauvages qui les utilisent comme habitat. Les programmes d'enlèvement devront se faire à l'automne, soit en dehors de la saison de reproduction des oiseaux (de mai à août), de façon à atténuer les effets possibles sur les oiseaux, la végétation herbacée, de même que le sous-étage. C'est justement durant cette période que les arbres sont les plus sensibles aux herbicides; les traitements devraient donc se révéler très efficaces. Il faudra mener des enquêtes attentives sur le terrain avant l'enlèvement pour déterminer si d'autres espèces, dont des espèces en péril, seront touchées, puis mettre en œuvre les mesures d'atténuation qui s'imposent. De plus, il faudra examiner au préalable les endroits où des arbres seront abattus et toute route d'accès qui sera utilisée pour se rendre aux arbres et les abattre, pour s'assurer que d'autres espèces en péril ne sont ni piétinées ni endommagées. Dans la mesure du possible, le nombre de voies d'accès au site ciblé sera maintenu le plus bas possible. Les espaces créés dans la forêt par l'enlèvement de végétaux peuvent favoriser la croissance d'espèces envahissantes. Il faut donc perturber le sol le moins possible. On peut y favoriser le recrutement d'espèces indigènes par des plantations et l'enlèvement immédiat d'espèces envahissantes colonisatrices ou autres moyens. Si les mûriers blancs enlevés étaient denses, les espèces de sous-étage qui tolèrent l'ombre peuvent en subir le contrecoup (Parcs Canada, 2006). À certains endroits où le mûrier blanc occupe une part importante de la forêt, l'enlèvement peut faire diminuer la disponibilité de nourriture et d'habitat pour certains oiseaux et petits animaux; la présence accrue de mûrier rouge par un recrutement intensif au moyen de semis pourrait toutefois atténuer certains de ces effets. Les programmes d'enlèvement qui visent les mûriers blancs et les mûriers hybrides devraient comprendre un suivi pour déterminer la réussite des techniques mises en œuvre, les effets sur d'autres espèces, communautés végétales et processus écologiques, et les changements dans le taux d'hybridation du mûrier rouge. L'enlèvement de branches nuisibles à proximité des arbres fortement ombragés fera également l'objet d'une surveillance. Dans les deux cas, une gestion adaptative pourra être mise en œuvre et les efforts de rétablissement pourront être constamment adaptés et améliorés. Comme le mûrier rouge se trouve dans la zone biologique carolinienne, qui compte un nombre élevé d'espèces protégées et rares, il faudra veiller, dans toutes les activités de surveillance et de recherche, à réduire au minimum ou à éviter le piétinement ou la perturbation de ces espèces.

L'enlèvement des espèces envahissantes et de la végétation dans le parc national de la Pointe Pelée peut nécessiter des examens préalables prévus dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (1992, c. 37) (LCEE) lorsque certains projets soulèvent des préoccupations. La lutte contre les insectes, les maladies et la végétation envahissante dans les parcs provinciaux est prévue dans le document intitulé A Class Environmental Assessment for Provincial Parks and Conservation Reserves (MRNO, 2005).

La gestion et notamment le contrôle des grandes populations de cormorans à aigrettes dans les îles Middle et Sister Est aura des conséquences défavorables sur certains individus, mais sera bénéfique pour de nombreuses espèces de plantes indigènes, en particulier les arbres, qui sont tués par les excréments riches en ammoniaque des cormorans. Le maintien de l'intégrité écologique de la forêt carolinienne de l'île est l'objectif visé. Les efforts faits pour limiter le broutage des cerfs auront des effets bénéfiques sur la végétation de la forêt endommagée par le broutage. Les deux pratiques de gestion ont été évaluées dans des processus distincts d'évaluation environnementale et des mesures d'atténuation propres à chacune ont été ou seront mises en œuvre. Tout conflit éventuel découlant des efforts de rétablissement devra être corrigé tôt au début des mesures ou par une gestion adaptative.

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