Abronie à petites fleurs (Tripterocalyx micranthus) évaluation et rapport de situation du COSEPAC : chapitre 8

Facteurs limitatifs et menaces

1. Stabilisation des dunes 

Le principal facteur limitant l’abronie à petites fleurs est son inféodation aux étendues de sable non stabilisé dans les champs de dunes. Aussi la principale menace pour la survie de l’espèce au Canada est-elle l’envahissement des dunes actives par la végétation, qui se produit un peu partout dans les Prairies et rétrécit de plus en plus l’habitat de l’abronie à petites fleurs. À plusieurs endroits en Alberta, la superficie de sable actif s’est rétrécie de 30 à 90 p. 100. De grandes étendues de sable mobile se sont stabilisées au cours des quarante dernières années (Wallis, 1988). Si la tendance se maintient, les espèces indigènes rares, notamment l’abronie à petites fleurs dont l’effectif est dangereusement faible, pourraient disparaître complètement (Wallis et Wershler, 1988). La stabilisation des dunes est un processus lent qui pourrait être renversé par le changement climatique ou par une intervention humaine sélective.

En 2001, année particulièrement sèche, on a pourtant noté une poursuite du déclin de l’habitat de l’abronie à petites fleurs. Il est fort probable que les étendues de sable des sites de l’île Wolf et de la rivière Lost se soient complètement stabilisés et qu’en conséquence l’espèce soit disparue de ces deux localités. La majeure partie des étendues de sable du site de la Saskatchewan-Sud, en Saskatchewan, est stabilisée, de même qu’une partie importante des dunes de Bow Island, Purple Springs et Bull Pound. On constate donc une perte importante de substrats susceptibles d’abriter l’espèce dans l’ensemble de son aire canadienne.

Il faudrait plusieurs années de sécheresse et une inversion du processus de stabilisation des dunes pour rétablir l’habitat nécessaire à la survie de l’abronie à petites fleurs. Il semble que la stabilisation des dunes par la végétation découle naturellement de la lutte contre les incendies de végétation et de l’absence de troupeaux de bisons dans les prairies. Il ne paraît pas exagéré de dire que si le processus de stabilisation des dunes n’est pas renversé, l’abronie à petites fleurs est condamnée, probablement à brève échéance, à disparaître du Canada.

Plusieurs chercheurs ont constaté que les dunes d’Alberta et de Saskatchewan sont en voie de stabilisation depuis une cinquantaine d’années (Epp et Townley-Smith, 1980, 1982; Pylypec, 1989; Wallis, 1988; Wallis et Wershler, 1988). Dans la plupart des champs de dunes de ces provinces, les étendues de sable nu se sont fortement rétrécies. Le cas est confirmé notamment pour les dunes Middle Sand Hills, en Alberta, ainsi que pour les dunes Dundurn, Harris et Great Sand Hills, en Saskatchewan (Smith et Bradley, 1992).

L’ironie veut que la stabilisation des dunes ait déjà été considérée comme une saine pratique de conservation. Les responsables se sont donné en effet beaucoup de mal pour stabiliser les étendues de sable : lutte contre les incendies de végétation, rotation des pâturages, etc. Ils ont même tenté de retenir les sables mobiles en les recouvrant de pneus usés (Wallis et Wershler, 1988)

2. Changements d’utilisation des terres

Dans le passé, l’habitat de l’espèce s’est rétréci en conséquence directe des pratiques agricoles. Plusieurs grandes plaines de sable ont été presque entièrement mises en culture, et ce qui reste des étendues de sable est fortement menacé (Wallis, 1988). La mise en culture des terres entourant les sites connus de l’abronie à petites fleurs empêche l’espèce de s’étendre.

Le site de Bow Island, où se trouvait autrefois la plus importante population de l’espèce au Canada, est aujourd’hui un champ de pétrole, avec tout ce que cela comporte de voies de circulation, de puits, de canalisations de transport et autres infrastructures d’exploitation et d’exploration. Les activités pétrolières ont certes déstabilisé les dunes à plusieurs endroits, créant ainsi des milieux propices à l’établissement de l’abronie à petites fleurs, mais il faut se demander si la superficie nouvellement dénudée compense celle occupée par les installations et voies de circulation dans le champ de dunes.

3. Envahissement par les mauvaises herbes

La restauration de la végétation le long des voies d’accès et de circulation dans le champ de pétrole pose un risque d’envahissement des dunes par des espèces exotiques. La dune du cours inférieur de la rivière Bow commence à être envahie par la soude roulante (Salsola kali), le cléome denté (Cleome serrulata) et l’orge queue-d’écureuil (Hordeum jubatum) (Wallis, 1987).

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