Renard véloce (Vulpes velox) évaluation et rapport de situation du COSEPAC 2009 : chapitre 6


Biologie

Dynamique des populations

Les renards véloces sont généralement des animaux à monogamie sociale (Kilgore, 1969), mais on observe également des copulations hors couple (Kitchen et al., 2006). Un groupe social typique est composé d’un couple avec des petits, et peut aussi compter des femelles non reproductrices qui aident à élever les petits (Kilgore, 1969; Covell, 1992; Olson et al., 1997; Sovada et al., 2003; Tannerfeldt et al., 2003). En Alberta, on a observé au cours de la même journée un mâle avec deux portées de femelles différentes (Moehrenschlager, 2000). En Alberta et en Saskatchewan, on a également noté des cas de partage de terriers et d’utilisation simultanée du domaine vital, notamment durant la saison du rut (Carbyn et al., 1994). Kamler et al. (2004) ont évalué la relation entre la densité, l’accouplement et la structure du groupe de renards véloces situé dans le nord-ouest du Texas. Des populations de densité élevée et faible étaient séparées par seulement 40 km et la végétation et l’alimentation étaient similaires entre les sites. Cependant, les groupes polygynes, le partage de terriers et les femelles non reproductrices ont seulement été observés dans les zones densément peuplées, alors que les couples étaient monogames chez les populations de faible densité.

Au Canada, les renards véloces commencent à se reproduire à la mi-février (Moehrenschlager et Macdonald, 2003). Les femelles ont une seule période de chaleur par année (Kilgore, 1969). La gestation dure environ 51 jours (Schroeder, 1985), et la taille des portées est d’environ quatre petits (Kilgore, 1969; Hillman et Sharps, 1978; Moehrenschlager, 2000; Olson et Lindzey, 2002), mais peut atteindre huit petits (Moehrenschlager, 2000). Les deux parents s’occupent des jeunes. Le nombre de petits par portée augmente lorsque d’autres renards apportent de l’aide (Covell, 1992). Les petits pèsent de 50 à 100 g à la naissance et ouvrent les yeux après 10 à 15 jours. Ils sortent du terrier de mise bas environ quatre semaines après la naissance, et sont sevrés à 6 ou 7 semaines (Kilgore, 1969; Hines, 1980). Les petits coupent le lien étroit avec leurs parents à quatre ou six mois (Covell, 1992), mais Moehrenschlager (2000) a observé que seulement 33 % (n = 12) ont quitté le domaine vital où ils sont nés à 9,5 mois. À 18 mois, ils se sont tous dispersés. Les mâles et les femelles sont sexuellement matures à la fin de leur première année (Kilgore, 1969; Morgan et Ernest, 2003), mais les femelles d’un an ne se reproduisent pas toutes (Carbyn, 1998).

Les renards véloces vivent généralement de 3 à 7 ans à l’état sauvage (Reid, 2006). En captivité, un individu a vécu jusqu’à près de 13 ans (Kilgore, 1969; Egoscue, 1979). Dans la région frontalière, les taux de survie annuels varient de 0,38 (IC de 95 % = 0,15–0,60) à 0,63 (IC de 95 % = 0,23–0,86) (Moehrenschlager et al., 2007b), et sont semblables aux taux estimés pour l’aire de répartition principale aux États-Unis (Covell, 1992; Sovada et al., 1998; Kitchen et al., 1999; Olson et Lindzey, 2002; Schauster et al., 2002; Zimmerman et al., 2003). Le taux de survie des jeunes dans la région frontalière (0–0,50, Moehrenschlager et al., 2007b) est également similaire à celui des États-Unis (0,13–0,69; Covell, 1992; Sovada et al., 1998; Kitchen et al., 1999; Schauster et al., 2002). Moehrenschlager et Macdonald (2003) ont mentionné que les taux de survie des renards véloces qui ont été réintroduits étaient semblables à ceux des individus sauvages. La mortalité est principalement attribuable à la prédation naturelle ou à des causes humaines. Rien n’indique que les maladies soient une source importante de mortalité (Moehrenschlager et al., 2004). La mortalité directe due aux humains est causée par le poison, la chasse, les collisions routières et le piégeage (Kilgore, 1969; Carbyn et al., 1994; Pruss, 1994; Sovada et al., 1998). La prédation par les coyotes est considérée comme la principale cause de mortalité chez les renards véloces (Covell, 1992; Carbyn et al., 1994; Sovada et al., 1998; Kitchen, 1999; Andersen et al., 2003; Moehrenschlager et al., 2007b).

Vie dans les terriers

L’accessibilité à des terriers convenables est très importante pour le maintien de populations viables (Egoscue, 1979; Pruss, 1999; Harrison et Whitaker Hoagland, 2003). Les renards véloces utilisent des terriers toute l’année (Kilgore, 1969; Egoscue, 1979; Hines, 1980; Tannerfeldt et al., 2003). Ceux-ci servent de refuges pour échapper aux prédateurs, se protéger contre les conditions météorologiques extrêmes, prévenir les pertes en eau, se reposer périodiquement et élever les jeunes (Cypher et al., 2003; Tannerfeldt et al., 2003). Les renards véloces utilisent de nombreux terriers simultanément (Moehrenschlager et al., 2004), généralement dans un rayon de 1 à 2 km²(Pruss, 1994; Tannerfeldt et al., 2003), mais dans l’ensemble du domaine vital (Moehrenschlager et al., 2004). Ils se serviront également d’autres trous de taille convenable pour échapper à leurs prédateurs (Pruss, 1999). Au Canada, des couples peuvent utiliser jusqu’à 8 terriers comptant de multiples entrées lorsqu’ils élèvent des jeunes (Pruss, 1994; Tannerfeldt et al., 2003) et jusqu’à 22 terriers par an (Moehrenschlager, 2000). Ils réutilisent ensuite des sites d’une année à l’autre (Pruss, 1994; Moehrenschlager, 2000; Tannerfeldt et al., 2003) et changent fréquemment de terrier (Kilgore, 1969).

Les terriers des renards véloces s’observent principalement dans la prairie à graminées courtes et la prairie mixte (Kilgore, 1969; Uresk et Sharps, 1986). Au Canada, ils vivent presque exclusivement dans les prairies indigènes, où ils ont une bonne vue des alentours (Carbyn, 1998). Leurs terriers se trouvent de façon générale dans des zones où les sols sont bien drainés, habituellement au sommet de collines ayant des pentes douces (Cutter, 1958a; Uresk et Sharps, 1986; Pruss, 1999). Les terriers de mise bas, au Canada, se trouvent en moyenne à 267 m de la route la plus proche et à 1 km d’une source d’eau (Pruss, 1999). Les entrées des terriers ont un diamètre d’environ 20 cm (McGee et al., 2006a) qui empêche probablement les coyotes d’entrer. Au printemps et à l’été, les terriers servant à élever les petits possèdent communément une à deux chambres centrales qui s’étendent à une profondeur d’un mètre et qui sont reliées à la surface par de nombreux tunnels (Cutter, 1958a; Kilgore, 1969). Les terriers qui sont utilisés pour s’abriter et fuir les prédateurs comptent moins d’entrées (Hillman et Sharps, 1978; Pruss, 1999; Moehrenschlager, 2000; Olson, 2000).

Les amas de terre et la taille des entrées permettent de distinguer les terriers des renards véloces de ceux des coyotes et des renards roux (McGee et al., 2006a). Au total, 96 % (n = 74) des terriers des renards véloces ont des amas de terre visibles aux entrées, qui sont plus petites que celles des terriers des coyotes et des renards roux.

Les renards véloces peuvent creuser leurs propres terriers, mais ils agrandissent souvent ceux des spermophiles, des chiens de prairie (Cynomys spp.) ou des blaireaux d’Amérique (Cutter, 1958a; Kilgore, 1969). La plupart des terriers sont construits dans les substrats naturels, mais ils le sont aussi parfois dans des ouvrages humains, tels que des tuyaux, des ponceaux ou des bâtiments, ou encore dans des amas de gravats (Moehrenschlager et al., 2004). Pruss (1994) a observé que les changements de terriers avaient lieu dans un rayon de 500 m; cependant, Moehrenschlager (2000) a fait mention d’un couple déplaçant une portée de sept petits à 1,9 km.

Régime alimentaire et comportement de recherche de nourriture

Les renards véloces sont des prédateurs opportunistes qui se nourrissent principalement de mammifères, mais également d’oiseaux et de leurs œufs, d’insectes, de plantes et de charogne (Cutter, 1958b; Kilgore, 1969; Hines, 1980; Cameron, 1984; Uresk et Sharps, 1986; Hines et Case, 1991; Pruss, 1994; Zimmerman, 1998; Kitchen et al., 1999; Sovada et al., 2001). Dans la région frontalière, l’analyse des fèces a révélé que les mammifères sont les proies les plus fréquentes (68,3 %  – dont des rongeurs : 59,5 %; des lagomorphes : 7,1 %; de grands mammifères [probablement de la charogne] : 1,7 %), avant les insectes (23,8 %) et les oiseaux (8,0 %) (Moehrenschlager et al., 2007b). Reynolds et al. (1991) ont noté que les petits rongeurs et les charognes des ongulés étaient les sources de nourriture les plus importantes, avec une petite proportion de lagomorphes et de spermophiles. De manière générale, les insectes et les plantes sont consommés assez fréquemment, mais ils constituent seulement une petite portion de la biomasse totale (Kilgore, 1969; Harrison, 2003; Moehrenschlager et al., 2004; Kamler et al., 2007a).

L’alimentation des renards véloces varie géographiquement, selon les éléments du milieu et l’abondance des proies. Au Kansas et au Nebraska, les rongeurs muridés sont leurs proies les plus fréquentes (Hines et Case, 1991; Sovada et al., 2001), même si les léporidés sont également communs (Cutter, 1958b; Cameron, 1984; Zumbaugh et al., 1985). Les chiens de prairie à queue noire (Cynomys ludovicianus) sont très communs au Dakota du Sud (Uresk et Sharps, 1986), mais ne constituent vraisemblablement pas une source importante d’alimentation (Carbyn, 1998). De façon générale, les proies des renards véloces ne sont pas plus grosses que des lièvres de Townsend (Lepus townsendii; 3–4 kg).

Dans la partie nord de l’aire de répartition des renards véloces, le choix de proies varie de l’été à l’hiver. À titre d’exemple, les spermophiles et les criquets (Melanoplus spp.) constituent une source d’alimentation importante en été (Carbyn, 1998). En hiver, les renards véloces s’alimentent probablement de lagomorphes.

Les renards véloces sont avant tout des chasseurs solitaires dont les périodes d’activité varient selon les saisons (Carbyn, 1998). En effet, leur comportement est dicté par la longueur des journées et varie selon les températures (Carbyn, 1998). Les renards véloces sont principalement nocturnes en hiver, mais plus crépusculaires au cours de l’été (Moehrenschlager et al., 2004). Pruss (1994) a observé qu'au printemps et en été, les renards véloces sont actifs sur de longues périodes, tant de jour que de nuit. Ils ont tendance à suivre des routes prévisibles quand ils chassent, telles que le long d’une clôture, d’une crête, d’une route ou d’un sentier (Carbyn, 1998). Ils cachent parfois leur nourriture (Pruss, 1994; Sovada et al., 2001).

Physiologie

Dans les Prairies, les températures varient de près de –40 °C en hiver à +40 °C en été (Archives nationales d'information et de données climatologiques, 2002). Les renards véloces assurent leur thermorégulation et conservent leur eau en choisissant leurs périodes d’activité et en utilisant leurs terriers. Durant les jours froids et ensoleillés de l’hiver, ils se chauffent souvent au soleil à l’entrée de leur terrier (Carbyn, 1998). Lorsqu’ils ont accès à de l’eau libre, les renards véloces ont besoin d’environ 210 g de nourriture par jour. S’ils ne peuvent boire, leurs besoins en eau sont satisfaits seulement par la nourriture, par l’ingestion d’environ 330 g par jour (Flaherty et Plaake, 1986).

Déplacements et dispersion

Les domaines vitaux des renards véloces peuvent se chevaucher, mais il existe une séparation presque totale entre les zones dédiées aux activités essentielles des individus de même sexe, ce qui suggère la territorialité (Pechacek et al., 2000; Andersen et al., 2003; Sovada et al., 2003). À titre d’exemple, les domaines vitaux des renards véloces du Canada (y compris le Montana) se chevauchent dans un pourcentage de 74 % pour les couples et de seulement 29 % pour les voisins (Moehrenschlager et al., 2007b).

Au Canada, les jeunes renards véloces commencent à se disperser en août (Pruss, 1994; Moehrenschlager, 2000). Cependant, six semaines avant la saison de reproduction suivante, jusqu’à deux tiers des jeunes de l’Alberta et de la Saskatchewan restent dans le domaine vital où ils sont nés (Moehrenschlager et al., 2004). Lorsqu’ils ont atteint 18 mois, tous les renards se sont dispersés (Moehrenschlager et Macdonald, 2003). La distance de dispersion normale est de moins de 15 km (Covell, 1992; Moehrenschlager, 2000; Schauster, 2001; Sovada et al., 2003). Cependant, on a enregistré une longue distance de dispersion chez cinq jeunes nés dans la nature, à la réserve des Pieds-noirs (distance = 43,1–55,8 km, et l’un d’eux a parcouru 190,9 km; Ausband et Moehrenschlager, 2009). Les renards véloces qui ont été déplacés du Wyoming vers le Colorado se dispersent sur des distances moyennes de 27 km (adultes) et de 19 km (jeunes) (Moehrenschlager, 2000). Il est à noter que les mâles se déplacent plus loin que les femelles (Covell, 1992; Moehrenschlager, 2000). Au Texas, Nicholson et al. (2007) ont observé que la direction de la dispersion reflète les pratiques d’utilisation des terres, les animaux se déplaçant généralement vers les grands pâturages libres éloignés des éléments anthropiques.

La grandeur du domaine vital des renards véloces, tout en étant corrélée à l’abondance des proies, varie de façon significative selon la méthode de calcul, les saisons et la taille de l’échantillon (Hines et Case, 1991; Kitchen et al., 1999; Pechacek et al., 2000; Andersen et al., 2003; Harrison, 2003; Sovada et al., 2003; Zimmerman et al., 2003). D’après la méthode des noyaux fixes, l’étendue du domaine vital de 36 renards véloces de la région frontalière était de 31,9 ± 4,8 km² (Moehrenschlager et al., 2007b). Les domaines vitaux des renards véloces du Canada, dans la périphérie nord de l’aire de répartition mondiale de l’espèce, sont environ trois fois plus grands que ceux des renards nains du Mexique (Moehrenschlager et al., 2007).

Relations interspécifiques

Les coyotes sont des prédateurs importants des renards véloces du Canada, et les renards roux sont vraisemblablement en compétition avec ces derniers (voir la section Menaces et facteurs limitatifs).

Adaptabilité

Les renards véloces se sont adaptés à la vie dans les prairies grâce à leur stratégie d'alimentation opportuniste et à l'usage qu'ils font des terriers pour s'abriter et se protéger des prédateurs (Pruss, 1999; Allardyce et Sovada, 2003; Harrison et Whitaker Hoagland, 2003; Tannerfeldt et al., 2003). En réponse au climat extrême des prairies, ils peuvent assurer leur thermorégulation et réduire leur perte en eau en ajustant leurs périodes d’activité et leur utilisation des terriers (Pruss, 1994). De plus, leurs pieds sont bien isolés, avec des coussinets presque entièrement recouverts de poils (Egoscue, 1979).

Comme leur nom l’indique, les renards véloces courent rapidement et sont capables d’atteindre des vitesses de 60 km/h. Leur ossature élancée et leurs longues pattes sont adaptées à la course (Egoscue, 1979), ce qui les aide à fuir les prédateurs et à chasser des proies rapides, comme des lagomorphes.

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